Démolition du Château de Lagny-le-Sec : « Juste une mise au point »



Puisque la vidéo de la démolition du Château de Lagny-le-Sec tourne en boucle sur les réseaux sociaux depuis quelques jours, il me semblait judicieux de faire le point sur cette « triste affaire ». En effet, cet acte de « vandalisme patrimonial » remonte à trois ans, ce qui nous force à constater que les internautes ont parfois la mémoire qui flanche, car à l’époque cette démolition avait fait grand bruit, tellement de bruit que l’information se classait parmi les dix premières les plus consultées de la semaine.

Ce combat de l’impossible fut sans doute l’un des plus difficiles qu’Urgences Patrimoine a mené, pour un résultat qui était connu d’avance. Mais « à vaincre sans péril on triomphe sans gloire » et, même si point de triomphe à la fin, notre satisfaction était d’avoir fait le maximum.

Nous avions été prévenus seulement trois semaines avant la démolition par Thomas Nerrière, un jeune passionné de patrimoine qui aurait été capable de donner sa propre vie pour sauver ce château.


Trois semaines, trois toutes petites semaines pour remuer ciel et terre et essayer de faire entendre raison à Didier Doucet, le maire « démolisseur ». Mais en vain. Il n’a d’ailleurs jamais souhaité communiquer avec nous.

Mais quel prétexte invoquait-il pour justifier cette scandaleuse démolition ?

Toujours le même : l’état calamiteux du château et les montants de restauration trop élevés par rapport à une démolition et la construction de la salle « multifonctions intergénérationnelle » qu’il souhaitait voir en lieu et place de l’édifice. Nous avons demandé à voir l’étude réalisée pour évaluer le montant desdits travaux, mais sans succès, et pour cause, il semblerait qu’elle n’ait jamais existé.


Mais au fait, état calamiteux pourquoi ? Simplement, parce qu’après le rachat de l’édifice par la commune 25 ans plus tôt, jamais les moindres travaux d’entretien n’ont été réalisés.

On a délibérément laissé « mourir » le château, avec déjà la perspective, sans doute, de le démolir un jour et de posséder un joli terrain de plus de 8000 m2, sur lequel on pourrait faire pousser un joli petit immeuble ou, comme il en était question à l’époque, cette fameuse salle multifonctions, salle qui d’ailleurs n’a pas poussé pour le moment.

Donc, un fois « ciel et terre remués », jusqu’à Jack Lang qui avait écrit à Françoise Nyssen, alors Ministre de la culture, il a fallu se rendre à l’évidence, tout était fini pour le Château de Lagny. Et un soir de juin, tard, Thomas m’a appelé pour me dire qu’ils commençaient la démolition.

Oui, car quand on est peu fier de ce que l’on fait, on se cache. Aussi quoi de mieux que de lancer un tel chantier en pleine nuit pour éviter d’être dérangé par les « détracteurs du projet » ? Le Château de Longperier (c’est son nom d’origine) est donc tombé une douce nuit de juin…

Les larmes des habitants, le lendemain, sont arrivées bien tard, car c’est à l’annonce de la démolition qu’il aurait fallu réagir. Hélas, à la moindre protestation de leur part, le maire leur disait que  « conserver le château et le restaurer fera considérablement augmenter les impôts locaux ». Toujours ce même prétexte, qui décourage le plus vaillant des habitants d’une commune.


La solution état pourtant toute trouvée. Si le château était si « encombrant » financièrement, alors pourquoi ne pas l’avoir mis en vente ? Cela aurait permis à la commune de rentrer quelques deniers sonnants et trébuchants et ne pas avoir à faire payer les contribuables pour les frais de démolition. Mais non, malgré les différentes propositions de rachat, le maire s’est obstiné à vouloir démolir.

Fin de l’histoire. Enfin non, pas tout à fait, car il y a un avant et un après Lagny-le-Sec. Nombreux sont ceux qui ont été touchés par les image de cette démolition, et beaucoup ont pris conscience de l’intérêt de patrimoine pour un territoire. Hélas, bien souvent, par peur des représailles, les gens n’agissent pas localement, car ils ont peur, par la suite, de se voir refuser un permis de construire, une extension, ou un emploi au sein de la commune. Donc, on ne dit rien et on se lamente en silence.


Alors pour une fois, je vais prêcher pour « notre paroisse », pour rappeler que tout le monde peut faire entendre sa voix de façon anonyme en adhérent à Urgences Patrimoine, car
nous sommes les seuls à avoir le courage de nous opposer ouvertement aux démolitions sur l’ensemble du territoire. Alors, effectivement, personne ne donne à ceux qui luttent. On donne à ceux qui restaurent, mais il est bon de rappeler que, pour restaurer, encore faut-il qu’il reste des édifices, et au rythme où vont les démolitions je ne suis pas certaine qu’il reste grand-chose à restaurer s’agissant du patrimoine de nos belles communes de France.

Alors pour 5 euros, vous pouvez faire avec nous la « guerre aux démolisseurs » et vous engager en cliquant sur
ce lien ICI.

« Le patrimoine ne peut pas lutter, ensemble nous pouvons »

Alexandra Sobczak-Romanski
Présidente d’Urgences Patrimoine

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Photo 3 : Béal et Blanckaert architectes
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