Massacre à la tronçonneuse en Pays de Caux

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Cela pourrait être le titre d’un film d’horreur. Il l’est pour certains amoureux du patrimoine normand et, en particulier, du patrimoine naturel. En revanche, pour d’autres, il ne s’agit aucunement d’un massacre, mais d’un acte prémédité pour permettre la construction de quelques « jolis » pavillons, comme nous les aimons tant.

Patrimoine remarquable ou pas, certains sont prêts à tout pour servir leurs intérêts. Mais, c’est vrai, que vaut une quarantaine de hêtres centenaires par rapport à un projet immobilier ? Rien.

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Tellement rien, qu’ils ont été abattus, visiblement sans la moindre autorisation, alors qu’ils figuraient dans le PLU de la commune. Pour le moment, le maire ne semble pas disposé à dresser un procès-verbal d’infraction au contrevenant, mais nous espérons sincèrement qu’il le fera prochainement. À l’heure où tout le monde fait de l’écologie son cheval de bataille en général, et de la « reforestation » en particulier, il serait de bon ton de punir ceux qui détruisent ce que la nature nous a offert.

C’est une de nos adhérentes qui a donné l’alerte et qui nous a permis de recueillir le témoignage de cet enfant du pays, qui n’en revient toujours pas.

Ludovic Lefèvre à 39 ans, il est jardinier de profession. Il est originaire de Normandie, plus exactement d'Autretot, un petit village cauchois de 1300 âmes, village de son enfance où ses parents résident toujours.

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« Ce village se caractérise par son fleurissement, ainsi que par son paysage typique du Pays de Caux, en particulier à cause de grands alignements d'arbres plantés sur des talus, essentiellement des hêtres. Ce sont nos « clos masures* », un patrimoine naturel unique au monde (Demande d'inscription à l'UNESCO).

Mais voilà ce paysage aujourd'hui est en grand danger de disparition principalement à cause de l'urbanisme galopant dans nos villages, et la modernisation du milieu agricole.

Le vendredi 2 avril comme je le fais régulièrement, je vais rendre visite à mes parents. Connaissant parfaitement le paysage de mon village, je me dis « quelque chose cloche ».  Afin d’être sûr de moi je me déplace jusqu'à l'endroit. Encore une fois, ce fut le même constat : des arbres remarquables de 150 ans, voire plus, ont été massacrés et bien entendu sans autorisation.

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Pourtant cet alignement d'arbres était inscrit au PLU et protégé par l’article L350.3 du code de l'environnement. J'apprends que ce terrain doit devenir constructible pour faire « pousser » quelques pavillons. Ça valait bien la peine de tuer une quarantaine d’arbres.

Je contacte le journal local, le
Paris Normandie. Mon interview a lieu le samedi après- midi et le journaliste contacte le maire qui, embarrassé de la tournure de l’événement, dit qu’il est furieux face à cet abattage illégal.

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L'article sort dans la presse le lundi de pâques. J'espérais que l'élu prenne ses responsabilités pour faire un exemple de cette affaire, afin de mettre un terme à ces écocides, mais hélas une nouvelle fois on m'explique que Monsieur le Maire ne déposera pas plainte. Pour la seule et unique raison que, par le passé, ses prédécesseurs ont déjà déposé plainte pour le même type d'infraction, mais que la justice a toujours classé ce genre d’affaire sans suite.

Bien sûr j'ai du mal à croire à ces explications. Encore une fois, les contrevenants sont impunis et tout le monde laisse faire. Quant à nos élus, ils préfèrent fermer les yeux !

J'en appelle aux citoyens amoureux de la nature et du patrimoine pour dénoncer ces massacres. »

Ludovic Lefèvre  

* Le Clos-Masure, un patrimoine unique. L'agencement des arbres qui entourent les fermes fait actuellement l'objet d'une étude en vue d'une candidature à l'UNESCO. L’objectif est de sauvegarder ce patrimoine unique au monde. Les clos-masures disparaissent en effet petit à petit sous le coup de la modernisation de l’agriculture et de l’évolution des modes de vie. Ils sont souvent restructurés : talus aplanis, arbres abattus, mares comblées ou perdent leur vocation agricole. La reconnaissance des clos-masures par l'UNESCO favoriserait la sauvegarde de ce patrimoine fragile et méconnu. [Source : Normandie Tourisme]



Crédits photographiques: Ludovic Lefèvre