Depuis sa démolition en 2018, plus personne n’a parlé de l’église d’Asnan, charmant petit village du département de la Nièvre. Mais quel crime avait donc commis cet édifice pour être réduit en poussière ? Juste celui d’être né au XIXe siècle et de ne pas avoir été entretenu par la commune, comme pourtant la loi de 1905 l’y oblige.
Il y a quelques semaines le Journal du Centre est allé interroger certains « protagonistes » de ce patrimonicide et nous constatons que « non, rien de rien, non, ils ne regrettent rien ».
Bien évidemment, l’argument premier pour se racheter une virginité est : « nous n’avions pas les moyens ».
Certes — mais 1 : si l’édifice avait été entretenu comme il se doit, le coût des restaurations aurait été moindre. 2 : nous rappelons qu’une restauration par « tranches » était tout à fait envisageable. 3 : nous aurions été heureux d’avoir accès aux devis et aux études (mais y a-t-il eu des études ?), car les sommes annoncées nous semblent totalement disproportionnées.
Dans l’article, un des élus affirme que personne n’a voulu aider la commune. C’est faux, et nous sommes bien placés pour le savoir, puisqu’un peu avant la démolition, nous avions contacté Madame le Maire afin de lui proposer notre aide. Déjà pour revoir le devis de restauration, afin de justement démontrer que les travaux d’urgence pouvaient être réalisés à moindre coût et, ainsi, sauver l’édifice. Mais nous avions bien senti qu’il était trop tard, alors nous avions au moins proposé la dépose gracieuse des vitraux pour les conserver, car à part un, tous devaient disparaître. L’édile avait d’ailleurs renoncé à cette dépose parce que le devis de 40.000 euros était trop élevé. Visiblement, la gratuité de l’intervention ne l’a pas motivé, puisque les vitraux ont terminé leur vie sous les pelleteuses et sans doute dans les mains du démolisseur pour les plus beaux.
Cette démolition avait divisé les habitants, mais comment lutter contre la municipalité « toute puissante », lorsqu’on est un simple citoyen ? Surtout quand l’argument majeur est l’argent et que l’on vous fait comprendre que, si l’on restaure, les impôts locaux vont considérablement augmenter (argument imparable).
Et puis il y a les grands penseurs qui vont vous dire qu’une église ça ne sert à rien, parce qu’il y a de moins en moins de fidèles qui vont à la messe. Argument certes recevable, mais dans ce cas, pourquoi ne pas vendre l’édifice ? Pourquoi vouloir détruire à tout prix ? D’ailleurs parlons-en du prix, car une démolition a un coût et c’est bien de l’argent public qui sert à balayer, d’un revers de pelleteuse, 150 ans d’histoire locale.
Toujours est-il qu’aujourd’hui, élus et habitants peuvent s’enorgueillir d’avoir une jolie « placette » sur laquelle trône une cloche « rescapée » au centre de quatre angles de pierre, eux aussi épargnés, en guise de trophées, pour ne pas oublier.
Mais pour ne pas oublier quoi ? Que de nos jours, les édifices religieux de nos jolis coins de France sont démolis sans vergogne ? Ou pour oublier que, tout peut s’oublier, qu’il est temps de vivre avec son temps ? Que le patrimoine n’a aucun intérêt et qu’il est préférable de le détruire au profit de ces « jolies placettes, ou autres parkings ».
À quand le jour où l’on se rendra compte que ce patrimoine est NOTRE patrimoine. Aussi modestes soient-ils, ces petits édifices sont tous des grands témoins de notre histoire collective et il est de notre devoir de leur offrir un avenir et en aucun cas de les détruire.