Alors que nous venons à peine « d’enterrer » la chapelle Saint-Joseph à Lille, voici un nouveau combat contre la démolition d’un édifice religieux. Décidemment, sale temps pour les chapelles en 2021 !
Situé dans le centre historique de Cancale, le manoir de Vaujoyeux va trouver une seconde vie dans un projet immobilier. Il sera réhabilité en appartements — ce qui, a priori, ne nous semble pas une hérésie puisque nous militons plutôt pour « qu’importe la réhabilitation pourvu qu’elle évite la démolition ».
Donc nous devrions être heureux de ce projet mené par le géant Bouygues.
Sauf que cette réhabilitation va se faire au détriment d’un autre édifice présent dans l’enceinte du manoir. La chapelle Saint-Pierre ne doit pas être au goût du promoteur, puisqu’elle est purement et simplement rayée du projet. À la place, il est prévu d’y construire deux maisons individuelles.
Comme si de nos jours, les architectes n’avaient pas assez d’imagination pour intégrer l’édifice au projet, en le réhabilitant en maison d’habitation. Il existe bel et bien une clientèle pour des biens « atypiques » et nous pensons sincèrement que la chapelle aurait pu trouver preneur une fois rendue « fonctionnelle ».
Hélas, les choses n’ont pas été pensées ainsi. Donc la chapelle sera livrée aux pelleteuses.
Pourtant, en 2019, dans un article de Ouest France, le maire de Cancale affirmait que le site serait réhabilité dans le plus grand respect du patrimoine.
Extrait du journal Ouest France du 19/12/2019 :
Le Manoir Hamon Vaujoyeux réhabilité
Le 4 décembre, le conseil d’administration du centre communal d’action social, propriétaire du manoir Hamon Vaujoyeux, a approuvé la cession du bâtiment et de son jardin à l’Établissement public foncier de Bretagne, dans le cadre de la requalification du site de l’ancien hôpital. Les associations qui l’occupent seront localisées dans le futur pôle culturel et social et dans l’équipement public, Le Part’Age, qui sera situé dans la ZAC des Prés Bosgers, dont le permis de construire a été accordé.
Cette cession permettra de constituer une offre de logements renouvelée et de garantir la pérennité de ce, bâtiment patrimonial, élément architectural majeur du centre historique de Cancale. Le maire, a apporté les précisions suivantes : « Cette cession nous permet d’avoir une maîtrise municipale totale sur l’avenir de ce bâtiment du XIXe siècle très dégradé et en partie désaffecté, situé dans un périmètre qui le met sous protection des monuments historiques. Il n’a jamais été envisagé de le démolir mais bien de le réhabiliter. » Délibération approuvée avec une voix contre et une abstention.
On notera donc que la chapelle est dans un périmètre protégé MH. Ce qui signifie que l’Architecte des Bâtiments de France doit émettre un avis favorable avant toute— avis favorable délivré le 29 janvier 2021, date d’affichage du permis de construire. On remarquera que L’ABF ne donne aucune indication concernant l’édifice, mais uniquement des préconisations pour les constructions futures.
Encore une fois, comme nous l’avons vécu il y a peu pour la chapelle Saint-Joseph, c’est cet avis conforme qui signe l’arrêt de mort de ce patrimoine édifié en 1860 et en parfaite cohérence avec le patrimoine environnant.
Ce que nous trouvons également déplorable, c’est que la ville ait bénéficié d’une subvention de 1.000.000 euros dans le cadre du plan « Action Cœur de Ville ». Nous pensions que ce plan avait pour vocation d’encourager les communes à réhabiliter le patrimoine et non pas à le démolir. Là encore, le maire se félicite de ce projet de réhabilitation et affirme une totale transparence. À noter que, d’après nos sources, la démolition de la chapelle n’a jamais été ouvertement évoquée lors des réunions publiques. D’où un certain étonnement de la part des habitants aujourd’hui.
Surtout que dans l’extrait d’article qui suit, il est indiqué, au sujet de la chapelle, que c’est un édifice sans intérêt qui date des années 1969. Il y a juste une erreur d’un siècle, afin de faire passer l’annonce de la démolition comme un acte mineur, à partir du moment où l’on conserve le manoir.
ARTICLE Ouest France 10/02/2020 :
Un pilotage participatif fructueux et transparent
Le projet global de réaménagement et de renouveau urbain, Cancale centralité, a été initié dès le transfert de l’hôpital, en 2014.
« Une convention a été immédiatement signée avec l’Établissement public foncier de Bretagne (EPF), pour réaliser la cession de l’ancien hôpital et de la maison de retraite du manoir Hamon-Vaujoyeux, et des terrains annexes. Il n’y a jamais eu de négociation directe entre la Ville et quelque opérateur que ce soit. Aucun profit privé ne sera dégagé sur cette opération, car nous avons constamment gardé la maîtrise publique, explique le maire de Cancale (Ille-et-Vilaine) , Pierre-Yves Mahieu. Nous avons voulu, de surcroît, privilégier une conception participative et de co-construction. De 2017 à 2019, les échanges permanents entre le cabinet d’architecte-urbaniste, l’Architecte des Bâtiments de France (ABF), l’association des riverains et les utilisateurs des équipements publics concernés (école de musique, épicerie solidaire, autres), et la consultation par enquête sur les besoins des seniors ont permis d’améliorer ce programme, salué par les partenaires financiers et récompensé par l’attribution d’une subvention de 1 000 000 €, dans le cadre de Cœur de ville, piloté par le ministère de la Cohésion sociale. »
Pierre-Yves Mahieu rappelle aussi que la population a été constamment informée par la presse, les éditions de la ville (Le plat gousset et Cancale Magazine) ou son site.
« La transparence est totale et notre action n’a eu de cesse que de veiller à l’intérêt général, pour un Cancale de demain, alliant préservation du patrimoine, nouveaux logements, renforcement du lien social, revitalisation du tissu économique, davantage d’espaces verts et de liaisons douces. »
La chapelle de la discorde
Datant des années 1960 (sic), la chapelle n’a aucune valeur architecturale et n’est pas inscrite au patrimoine de la commune. Intégrée au fonctionnement de l’hospice (sis au manoir) pour les religieuses, puis lieu de recueillement de l’hôpital, elle est devenue lieu de stockage pour l’épicerie solidaire. « Nous porterons évidemment une attention particulière à ce que les statues, vitraux et autres artefacts de la chapelle démolie soient conservés et réutilisés pour garder la mémoire du lieu », précise Maude Korsec, conseillère déléguée à l’urbanisme.
On nous parle donc de transparence totale, nous émettons quelques doutes.
Quoi qu’il en soit, de nombreux internautes nous ont alerté dès qu’ils ont eu connaissance du projet de démolition il y a quelques semaines. Le permis de démolir étant affiché depuis le 29 janvier 2021, nous sommes encore dans les délais de recours pour contester le permis de construire.
Malheureusement, nous ne pouvons envisager de contester seuls ce permis. Et c’est la raison pour laquelle nous aurions besoin de quelques riverains courageux et/ où d’une association locale ou départementale ayant intérêt à agir.
N’hésitez pas à nous contacter par mail si vous souhaitez vous joindre à nous pour ce recours à cette adresse : urgences.patrimoine@gmail.com
Nous avons également besoin de photographies de l’intérieur de la chapelle, alors n’hésitez pas à nous les communiquer.
Cette nouvelle guerre aux démolisseurs, nous pourrons espérer la gagner si la mobilisation locale est importante. L’avenir de ce patrimoine est donc entre les mains de tous ceux qui aiment et respectent les témoins de leur histoire collective.
Une pétition a été mise en ligne il y a quelques semaines et nous vous invitons à la signer et à la partager ICI.
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