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La Gazette du Patrimoine est le média en ligne d'Urgences Patrimoine. 

Cette publication relaie les combats de notre association.

Elle permet la diffusion des informations relatives aux patrimoines et à ses acteurs. 

Photo du rédacteurAlexandra Sobczak

Démolition d’un monument : le droit au secours du patrimoine

Est-il si facile de détruire un monument ? Ce peut être une impression qui se dégage à la vue des multiples dossiers dont se saisit Urgences Patrimoine où autant d’églises, villas, chapelles et autres éléments du « petit » et du « grand » patrimoine se retrouvent menacés par le godet des pelleteuses.



Malheureusement, il arrive trop souvent que le combat se mène en session de rattrapage, lorsque le permis de construire ou de démolir a été accordé et que le délai de recours pour saisir le tribunal est dépassé. Cela ne signifie pas pour autant que l’échec est inéluctable : la récente affaire de la Chapelle Saint-Joseph est un témoignage de la remarquable efficacité que peut avoir un combat mené en-dehors de l’arène judiciaire.



Ceci étant, bien qu’aléatoire puisqu’elle aussi humaine, la voie de la justice peut s’avérer profitable. Elle l’est d’autant plus que le droit pose en la matière un régime protecteur des sites d’intérêt patrimonial, qu’ils fassent l’objet d’un classement aux Monuments historiques ou non.



En cas de classement ou d’inscription MH, la protection est d’ordre procédural. Rappelons d’abord le principe posé par le code du patrimoine (art. L. 621-29-1) : le propriétaire a la responsabilité de la conservation du monument historique inscrit qui lui appartient. Ce faisant, la démolition du bien ne peut être qu’exceptionnelle et doit en cela être justifiée par l’existence d’un péril imminent, ce qui suppose de justifier que l’immeuble menace ruine. Auquel cas, la démolition est obligatoirement soumise à la délivrance d’un permis après avis de l’architecte des bâtiments de France.



Cela signifie-t-il que les monuments hors-MH ne bénéficient quant à eux d’aucune protection ? Non, bien au contraire.



D’abord, les élus locaux peuvent décider en amont d’inventorier le « petit patrimoine » communal dont il est souhaitable d’assurer la conservation, pour ensuite en acter le caractère obligatoire dans le plan local d’urbanisme. Cette faculté est ouverte à l’article L. 151-19 du code de l’urbanisme.



Ensuite, et surtout, lorsque vient un projet de démolition d’un site remarquable, celui-ci « peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les travaux envisagés sont de nature à compromettre la protection ou la mise en valeur du patrimoine bâti ou non bâti, du patrimoine archéologique, des quartiers, des monuments et des sites. » (article L. 421-6 du code de l’urbanisme).



Le juge administratif peut ainsi être saisi d’un recours contre le permis s’il contrevient à cet impératif de préservation du patrimoine. Sa démarche est même plus protectrice encore puisqu’il n’hésite pas à contrôler lui-même que le projet n’y porte pas atteinte, en recherchant l’existence d’un intérêt patrimonial notable ou remarquable, et annuler les décisions qui entreraient en violation avec ce texte.



Cette approche jurisprudentielle a notamment été inaugurée à l’occasion de la triste affaire de l’église de Gesté. Cette église néo-gothique du Maine-et-Loire avait pu être sauvée des pelleteuses (1) : la commune, propriétaire, en avait initialement voté la démolition, ce qui avait valu la saisine du tribunal administratif de Nantes, lequel avait dans un premier temps rejeté le recours. La Cour administrative de la même ville avait finalement annulé le jugement : les juges d’appel avaient eux-mêmes relevé la particularité patrimoniale de ce monument et avaient conclu que même si le bien n’était ni inscrit ni classé, il ne pouvait pour autant faire l’objet d’une démolition tant qu’il ne menaçait pas ruine.



La Cour avait également rappelé, pour l’avenir, que « la circonstance, à la supposer établie, que le coût d'une restauration complète ne pourrait être supporté par les finances communales est sans influence sur la légalité de la décision contestée » …



Cette jurisprudence a trouvé maintes applications, avec comme dernier exemple en date celui de la maison du 32 rue du Phare de Saint-Pierre-d’Oléron, qui devait être « regardée comme un témoignage de l'expansion et de l'organisation du village en adéquation avec son environnement spécifique. »




(1) Pour un temps seulement : l’histoire de l’église de Gesté a finalement tourné à la tragédie puisque les travaux de démolition ont tout de même été entrepris par la force. Le juge des référés, saisi une nouvelle fois, a statué que les travaux étant commencés, l’église était cette fois-ci en état de péril imminent et que la seule façon d’y mettre fin était de mener les travaux de démolition à leur terme.



Maître Théodore Catry


19 Avenue de Grammont


37000 TOURS


Téléphone: 02 47 61 31 78


Télécopie: 02 47 20 26 02


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