Montmartre est sans conteste l’un des quartiers les plus aimés de la capitale, tant des Parisiens que des visiteurs du monde entier, et son attractivité repose très largement sur son patrimoine architectural, et la physionomie unique de ses rues.
On pourrait supposer que la Mairie de Paris aurait à cœur de protéger ce patrimoine, qu’elle projette d’ailleurs de faire inscrire au Patrimoine Mondial de l’UNESCO.
Malheureusement, les actions de l’équipe municipale en place démontrent précisément l’inverse.
La Ville de Paris a ainsi accordé un permis de construire à la RIVP (Régie Immobilière de la Ville de Paris) pour un projet de démolition-reconstruction de l’immeuble montmartrois de la fin du XIXe siècle situé au 46 rue des Trois Frères, dans le 18ème arrondissement de Paris.
Le projet consiste à raser ce bâtiment bas de 2 étages, caractéristique de l’habitat ancien du quartier, pour construire à sa place un immeuble de 5 étages en béton, deux fois plus haut, et s’avançant sur la cour pour la réduire de moitié.
Non content de détruire ce bâtiment historique, ce projet conduirait à la perte d’une “dent creuse”, qui crée pourtant la silhouette caractéristique des rues de Montmartre, et de la rue des Trois Frères en particulier.
À travers ce permis de construire, la Mairie de Paris exprime son total mépris pour l’avis de la Commission du Vieux Paris, qui a été consultée sur ce projet, et s’y est opposée sans équivoque :
“La Commission s’oppose à la perte de ce bâtiment très simple, caractéristique de l’habitat ancien du quartier et dont l’échelle basse marque le paysage architectural de la rue.”
L’immeuble du 46 rue des Trois Frères a en effet été construit en 1881 par l’architecte Thominot, pour les héritiers de la famille Braund, et présente toutes les caractéristiques de l’habitat faubourien, avec son toit de tuiles, ses façades enduites et ses bandeaux filants qui soulignent les niveaux sur rue. Les fenêtres côté rue présentent encore leurs garde-corps d’origine.
C’est donc un marqueur historique de la fin du XIXe siècle, qu’il faut à tout prix conserver.
Le bâtiment nécessite une réhabilitation intérieure, personne ne le nie, mais celle-ci n’a jamais été sérieusement envisagée par la Ville de Paris, qui n’a été en mesure de produire aucune étude de faisabilité – alors même que la conservation du patrimoine fait officiellement partie des engagements de Paris, à travers son Plan Action Climat de 2017 et son Pacte de la Construction parisienne de 2021.
Les riverains sont nombreux à s’élever contre ce projet : la pétition qu’ils ont lancée réunit à ce jour plus de 5,800 signataires.
Ils se sont constitués en collectif et ont multiplié les recours : auprès du Tribunal administratif d’abord, pour tenter de faire annuler le permis de construire, et en interpellant les élus de l’équipe municipale, trouvant des soutiens dans l’opposition qui se mobilisent eux aussi pour préserver le patrimoine.
Mais l’exécutif refuse toujours de revoir le projet, et persiste à privilégier le béton et la densification, sans égard pour le patrimoine unique du quartier.
Ce qui se joue autour de ce bâtiment est capital pour l’avenir de Montmartre. Si la municipalité n’est pas capable de reconnaître la valeur des témoins architecturaux du quartier, même simples, et les détruit dès que c’est possible pour bétonner et densifier toujours plus, il ne restera bientôt plus rien du patrimoine architectural de Montmartre.
Collectif de sauvegarde du 46 rue des Trois Frères.
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