Alençon — épisode III : basilique et briques en vrac
04/05/2021 12:06



Voici donc le 3ème épisode de la « Saga Alençon ». Nous avons beaucoup évoqué dans nos précédents articles l’avis favorable de l’Architecte des Bâtiments de France sur lequel s’appuie la légitimité du projet. Pour vous permettre de vous faire un avis objectif, le voici :

Alors que le visuel trônant devant la Basilique ne rassure personne, on nous informe que Pôle de Santé Libéral Ambulatoire d’Alençon devrait être parementé de briques, comme nous vous le rapportions dernièrement. Cette annonce se veut source d’apaisement. Enfin, quand nous avons sous les yeux ce plan, briques ou pas briques, cela nous laisse quelque peu dubitatifs.

Voici l’avis du président de la Société des Amis du Vieil Alençon :
Des briques, pourquoi pas ? On en trouve un peu dans le quartier pour les encadrements de baies dans certains bâtiments, mais cela reste plutôt anecdotique. Quand il y a des briques, elles sont aussi jointoyées. Les matériaux que l’on trouve dans la série des édifices proches du projet sont pour les maçonneries le granit d’Alençon et le calcaire de Montsort, pour les toits, les tuiles brun-rouge et les ardoises bleu-noir. Les murs sont couverts d’enduit à la chaux, et au pire, les moellons sont apparents noyés dans un ciment épais, gris ou noir, comme cela se pratiquait dans les années 1950-1960. Pour les constructions contemporaines, la règle semble exiger couvertures de zinc et bardages en bois.
Nous avons consulté le permis de construire. Il y est question de la réhabilitation de l’hôtel Bonet et des maisons voisines, intégrées au PSLA, ainsi que de l’extension. Ces notions de réhabilitation et d’extension doivent être éclairées par le contenu du permis de construire.
Ainsi, l’hôtel Bonet et les maisons voisines ne bénéficient d’aucune étude historique et architecturale. Ces bâtiments ne retrouveront aucun lustre. Des éléments pourraient être restituables : ils ne le seront jamais. Pas d’enduit à faux appareil, ou d’enduits aux clous qui font la spécificité de nos façades anciennes. Les murs resteront en moellons apparents et gros joints de ciment.

Les briques dont on nous parle en ville et sur les réseaux sociaux sont l’ingrédient de l’architecte pour lier l’ancien au neuf. Ce sont des briques longues, peu épaisses, montées à joints vifs « pour rappeler » les murs de l’hôtel Bonet. Arrêt sur image : l’hôtel Bonet est en moellons et gros joints ciment. Comment de la brique à joints vifs peut rappeler du moellon et des gros joints ciment ? L’architecte parle bien de pierre sèche !
Le petit pavillon du XVIIIe siècle donnant sur le parc sera décoiffé de sa charpente et rehaussé avec ces fameuses briques. Un toit sera refait. Un projet graphique nous le montre avec une terrasse et cette bande de briques et des baies hors de proportion.
Le permis de construire présentent trois déclinaisons de briques appelées « panachage ». Ces parements, de différentes teintes, n’existeront qu’en ce lieu d’Alençon. Ce matériau n’a rien à voir avec ce que le public imagine depuis samedi. Ce ne sont pas des briques ordinaire, rouge ou rosée. Ce sont des barres jaunes, beiges, grises.

En l’état, ce projet n’est pas acceptable.
Il aurait sa place dans le Périgord, assurément, mais à Alençon, il ne fonctionne pas. La construction de cette extension serait un précédent inquiétant pour la pérennité architecturale au cœur de notre ville. D’un autre côté, l’intervention minimaliste sur le bâti existant montre un désintérêt criant pour les architectures traditionnelles locales. La troncature du petit pavillon est pour sa part difficilement admissible, tant cet ensemble est emblématique de ces enchaînements de volumes et de cours qui font Alençon.
J.-D. Desforges,
Président de la Société des Amis du Vieil Alençon
Dans un article publié hier par le journal Ouest France, nous constatons que l’architecte confirme certains de nos doutes, en affirmant que sa construction ne GÊNERA PAS BEAUCOUP la visibilité.

Lire l’article dans son intégralité ICI.
Nous ignorons où ce combat nous conduira, mais si au lieu de vouloir construire à tout prix pour laisser « sa marque » dans l’espace public, on réhabilitait l’existant, les polémiques n’auraient pas lieu d’être. Pourquoi ne pas avoir « inventé » un pôle santé dans ce bâtiment qui attend d’être fixé sur son avenir.

À ce sujet, rappelons qu’Alençon bénéficie du dispositif « Action Cœur de Ville », avec les dotations qui vont avec. Ce dispositif accompagne les commune pour la redynamisation des centres anciens et oriente plutôt ses actions vers des réhabilitations du bâti ancien, plutôt que vers la prolifération des cubes de béton.
En attendant, la pétition a largement dépassé les 600 signatures et si ce n’est encore fait, merci de la signer ICI.
« Le Patrimoine ne peut pas lutter, ensemble nous pouvons. »

Crédits photographiques : photos 1-7 : Société des Amis du Vieil Alençon; photos 3-4-5 : Anthonin ZIEGLER Architecte ; photo 6 : Copie d’écran Ouest-France