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Décidément, rien n’arrête les actes de mutilation, même pas une protection au titre des Monuments Historiques. Nous espérons que l’appel des défenseurs du patrimoine sera entendu, et nous vous invitons vivement à signer la pétition qui se trouve à la fin de cet article.


Biographies des auteurs :



- Joëlle DUPRAZ est archéologue - Ingénieur au Ministère de la culture, directrice de fouilles et travaux de recherche sur le site archéologique d’Alba-la-Romaine de 1983 à 2001archéologue au Conseil général de l’Ardèche (en 2011). Parmi ses nombreuses publications scientifiques, on peut citer la direction de la Carte archéologique de la Gaule -Ardèche 07 (en collaboration avec Christel Fraisse), ainsi que sa collaboration aux Inscriptions latines de Narbonnaise, vol. 6, Alba, etc. Elle est par ailleurs présidente de l’Académie des Sciences, Lettres et Arts de l’Ardèche (ASLA)



- Roland COMTE est ethnologue. Diplômé de Sciences Po, ancien élève de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, est président-fondateur de l’association Cévennes Terre de Lumière (connaissance et sauvegarde du patrimoine naturel et culturel vivarois). Il siège à la Commission Régionale pour le Patrimoine et l’Architecture (CRPA) Auvergne Rhône-Alpes et est membre de l’ASLA.



Menace sur un site patrimonial remarquable : le prieuré clunisien Saint-Pierre et le plateau de Rompon


Le site du prieuré clunisien Saint-Pierre de Rompon, dit le « Couvent des chèvres », sur la commune du Pouzin, est menacé de disparition malgré une protection Monument Historique ISMH datant de 1927. L’extension de la carrière Dolménico-Dorel, anciennement Lafarge, entraînera à terme la destruction du vallon et du versant qui délimitent au nord le périmètre protecteur des vestiges du prieuré, mais aussi une enceinte paléochrétienne dotée d’une porte fortifiée de 5 ha remontant au Ve siècle, identifiée par diagnostic archéologique de l’Inrap en 2003, ainsi que d’autres témoins de périodes antérieures, néolithique, dolmens,  romaines  et des dolmens  proches de la grotte sépulcrale des Clots repérés en 2019.


Ce site emblématique de hauteur (308 m) d’altitude, duquel on a une vue spectaculaire sur la confluence du Rhône et de la Drôme, est un lieu prisé par les promeneurs et par les randonneurs qui empruntent le GR 42 A. En outre, sa flore et sa faune sauvage exceptionnelles (reptiles, dont le très rare lézard ocellé, chauves-souris…) – l’ont fait classer en espace Natura 2000.


L’association Avenir du Prieuré Saint-Pierre de Rompon - Le Pouzin (APCSPRLP) a été initiée en 2014 à la demande de l’entreprise Lafarge, alors propriétaire, et de la mairie du Pouzin, pour sauvegarder, sécuriser et valoriser le site dans le respect de son environnement. Une convention de partenariat (2014-2019) entre le propriétaire d’alors, les mairies de Le Pouzin et de Rompon, l’APCSPRLP la Fédération Européenne des Sites Clunisiens, a permis, en 2019, la réalisation de travaux de consolidation des vestiges ainsi qu’un fléchage et l’installation de panneaux destinés aux visiteurs. Le nouveau propriétaire a refusé la reconduction de cette convention qui donnait satisfaction à tous et a obtenu, en 2021, le droit, par arrêté préfectoral, d’étendre sa carrière en direction du sud et de l’ouest.


 


Or, cet arrêté, s’il prévoit bien la réalisation d’un diagnostic archéologique, ne fait aucune référence au périmètre protégé de 500 m induit par la protection MH. Cette extension d’exploitation, si elle était poursuivie, mettrait en péril l’intégrité du site, rendrait impraticable le chemin d’accès, déjà gravement menacé par le front de taille, utilisé non seulement par les visiteurs mais aussi par les randonneurs (présence du GR42) et les services de secours aux personnes et contre l’incendie, la pérennité du Prieuré, de l’enceinte du Ve siècle, mais aussi tout le riche passé archéologique, historique et naturel d’un plateau emblématique au potentiel touristique reconnu.



Malgré des rapports étroits avec les services de l’Etat chargés du patrimoine dans le département de l’Ardèche, en Préfecture de Région (DRAC, SRA et MH) et une entrevue le, 22 mars, avec le préfet de l’Ardèche, l’association n’a pas réussi à élucider la complexité juridico-administrative du dossier : spécificité de la législation concernant les carrières dans ce cas de figure, confronté au code du patrimoine concernant un périmètre protecteur MH.


Une nouvelle réunion de conciliation, à l’initiative du préfet de l’Ardèche, a eu lieu entre toutes les parties, le 29 juin 2023.


L’inquiétude est grande, partagée par les associations patrimoniales du département : APCSRLP, Cévennes Terre de Lumière, Fédération Ardéchoise de la Recherche Préhistorique et Archéologique, délégation départementale de la Fondation du Patrimoine, Sauvegarde des Monuments Anciens de l’Ardèche, Patrimoine Huguenot.


Cette affaire avait fait grand bruit au mois de mai. Olivier Fury comparaissait devant le Tribunal de Montpellier, après une assignation de la DRAC, pour avoir réalisé les travaux de restauration de sa chapelle sans autorisation.



Le chantier avait pourtant reçu à de nombreuse reprises la visite d’un Architecte des Bâtiments de France, mais les services de l’État ont considéré qu’il y avait matière à faire condamner un homme qui n’a jamais demandé un centime de subvention publique et qui a engagé plus de 350.000 euros pour sauver un édifice en ruine qui, jusqu’alors, n’avait jamais intéressé personne.



Lors de l’audience du 16 mai était requis la destruction pure et simple des travaux réalisés et une amende de 3000 euros pour le propriétaire et 3000 euros pour l’association de sauvegarde de la chapelle des augustins.


Le verdict est tombé comme prévu le 28 juin et même si tous les défenseurs du patrimoine croyaient encore à un miracle, il n’en fut rien.


La destruction du sol en béton ciré et des divers aménagements que tout le monde juge pourtant esthétique est confirmée. 12 ans de travail, 12 ans de passion risquent de finir en gravats et, bien évidemment, la destruction est à la charge du propriétaire.


Nous disons « risquent », car bien évidemment Olivier Fury a fait appel.


Il y aura donc un « match retour », en espérant que, cette fois, la justice ne condamnera pas un homme qui a sauvé un patrimoine de l’abandon.



 Voici le mail que nous a envoyé Olivier aujourd’hui :


Bonjour Alexandra,


Notre avocat est allé au tribunal pour faire appel sur la totalité du jugement.


Le greffe n'a pas pu donner de jugement papier.


Par contre nous sommes condamnés :  l'association à 3000 euros d'amende dont 1500 avec sursis et peine identique pour moi personnellement. (Alors que dans les statuts de l'association il est stipulé qu'elle est responsable de toute condamnation, et qu'elle a la gestion complète de l'église en lieu et place du propriétaire...)


Obligation de remettre en l'état l'église, avec destruction de tous les travaux faits sans autorisation (est ce qu'on doit comprendre qu'il faut avec une pelleteuse détruire toiture, mur etc ...) et ce sous 6 mois sinon astreinte de 75 euros x2 /jour.



Destruction du podium amovible qui est dans le cœur.


Saignées de 15 cm tout autour de la dalle béton ciré (pratique pour les gens qui veulent se rendre dans les chapelles car les pieds risque de se coincer au passage).


Nous pensons que la DRAC a suggéré 15 mm, mais le juge a lu cm.


Saillie dans la dalle au centre et sur les côtés. 


Il faut savoir que l'entreprise qui a fait la dalle, entreprise spécialisée avec 20 années d'expérience a fait des joints de dilatation, mais comme ils sont siliconés gris la DRAC n'a pas fait attention. De même sur le tour de la dalle où une protection d'étanchéité a été déposée.


Inutile de vous dire que nous sommes abattus puisqu'en plus la DRAC ne s'est pas porté partie civile, ne s'est jamais présentée aux 2 audiences, nous sommes donc condamnés alors qu'il n'y a aucun préjudice pour personne, et que nous avons le soutien de la mairie.


Dégoûtés, car nous avons des amendes alors que pendant les audiences comparaissaient des individus qui ont fait des constructions en zone Natura 2000, en zone de protection du littoral, et eux (tant mieux pour eux), sont condamnés à de petites amendes, presque tjrs avec du sursis !


Est-ce le patrimoine ou les églises qui gênent en France ?


Excusez ma colère, je vais, je pense, partir en vacances, et peut être avec quelques membres de l'association, prévoir une grève de la faim à l'intérieur de l'église en septembre.



Cordialement



Olivier



Nous ne pouvons qu’approuver la décision de faire appel, car nous sommes convaincus, que malgré ses manquements « administratifs », Olivier Fury n’a eu de cesse que de vouloir sauver cette chapelle et qu’il est absolument inconcevable qu’il soit condamné pour ça.

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