Sauvegarde du patrimoine : rĂ©acs, fachos, nazis⊠ArrĂȘtons la stigmatisation !
- Alexandra Sobczak
- 16 sept. 2020
- 3 min de lecture
Au bout dâun moment, la coupe est pleine et jâai tenu, en mon nom, Ă remettre « lâĂ©glise au milieu du village ». Les propos qui suivent nâengagent donc que moi.
Pierre Hurmic, le maire de Bordeaux, poursuit ses dĂ©lires et vient de dĂ©clarer « lâopinion des fachos je mâassoie dessus ». Pour un Ălu de la RĂ©publique, tenir de tel propos nâest Ă mon avis pas acceptable. Le fait de ne pas vouloir renoncer Ă un des symboles de fĂȘtes de NoĂ«l ferait donc de nous de dangereux fachos.
Seulement, il nâest pas tout seul Ă penser ça. Il suffit de lire les commentaires haineux sous certaines de mes publications pour se rendre compte que dĂ©fendre un patrimoine commun, une histoire commune et des traditions communes, nâest pas toujours de bon ton dans notre sociĂ©tĂ©.
Autrefois, tout au plus, je me faisais traiter de rĂ©actionnaire. JâĂ©tais considĂ©rĂ©e comme une femme aux idĂ©es poussiĂ©reuses, pour qui toute modernitĂ© Ă©tait Ă proscrire. Je tiens Ă rassurer ceux qui mâont affublĂ© de cet adjectif par le passĂ©, je ne mâĂ©claire pas Ă la bougie, et jâattends avec impatience la fibre. Incroyable non ?
Jâai eu Ă©galement droit Ă Â : « Vieille bourge catho de droite ! » Alors dans lâordre : vieille : oui Ă cinquante ans on peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme vieille, mais je ne pense pas que ce soit une tare.
Bourge : petite fille de mineur, je sais exactement dâoĂč je viens et ce qui me connaissent savent que je ne me suis jamais prise pour ce que je nâĂ©tais pas. Ce qui est intĂ©ressant, câest de constater que, dans lâesprit embrumĂ© de certains, il faut ĂȘtre forcĂ©ment riche et appartenir Ă une certaine classe sociale pour dĂ©fendre le patrimoine. Ce qui est une hĂ©rĂ©sie totale. MĂȘme si dans les « hautes sphĂšres » on ne prend en compte que lâavis « des hautes sphĂšres », le « peuple », dont je suis issue, a aussi largement son mot Ă dire sur le sujet.
Catho : Je suis de confession catholique, mais une partie de ma famille est protestante. Je ne vais pas Ă la messe et je suis mĂȘme entrĂ©e en « guerre » contre lâinstitution catholique elle-mĂȘme, notamment, en ce moment encore, pour sauver lâĂ©glise Sainte-Germaine et la chapelle Saint-Joseph de la dĂ©molition. Câest quoi encore cette idĂ©e quâil faut-ĂȘtre une « grenouille de bĂ©nitier » pour dĂ©fendre le patrimoine religieux ?
Enfin : de droite : Depuis la crĂ©ation dâUrgences Patrimoine, jamais je nâai Ă©tĂ© « encartĂ©e » oĂč que ce soit. Ceux qui suivent mes combats depuis le dĂ©but peuvent en attester. Je fais la « Guerre aux dĂ©molisseurs » tous partis confondus. Et je trouve fort regrettable quâune Ă©tiquette « ExtrĂȘme droite » soit collĂ©e sur le dos de tous ceux qui dĂ©fendent le patrimoine.
La cause du patrimoine est lâaffaire de tous. Et peu importe que les personnes qui dĂ©fendent cette cause soit dâextrĂȘme droite, dâextrĂȘme gauche, du centre, du centre droit, du centre gauche⊠Le principal Ă©tant quâils agissent et quâils nâaffichent pas leurs idĂ©es politiques lors de leurs actions. Câest le principe mĂȘme de la dĂ©mocratie.
Si les « étiquettes », câĂ©taient limitĂ©es à ça, cela mâaurait plutĂŽt fait rire, mais depuis quelques temps, les choses ont franchi une limite inacceptable.
Facho et Nazie : tout a commencĂ© lorsque jâai relayĂ© lâaction des jeunes parisiens qui ont voulu nettoyer et protĂ©ger les statues Ă Paris. Jâai eu droit Ă une avalanche dâinsultes, suite Ă cette publication et se faire traiter de nazie sous prĂ©texte que ces jeunes sont « de droite » est absolument inacceptable.
Cependant, effectivement, quand on sâengage pour la cause du patrimoine on sâexpose Ă ce genre de dĂ©rives.
Reste le traditionnel : « rĂ©ac » ! Bon, soit je veux bien tolĂ©rer cette remarque. Car si ĂȘtre « rĂ©ac », câest dĂ©fendre la mĂ©moire collective et lâidentitĂ© culturelle, alors je suis effectivement cela.
Mais ceux qui se permettent dâĂ©mettre ce genre de jugement, ne devraient-ils pas se demander si la cause du patrimoine est aussi poussiĂ©reuse que ça ? Car, mĂȘme si tout nâest pas « patrimoine », un pays comme le nĂŽtre est quand mĂȘme pourvu de richesses patrimoniales qui font vivre (ou survivre) des milliers de personnes. Alors la cause du patrimoine ne serait-elle pas au contraire trĂšs moderne et un formidable vecteur Ă©conomique et social dâavenir ?
En tout cas, quand le maire de Bordeaux stigmatise tous ceux souhaitent voir maintenu le traditionnel sapin de NoĂ«l dans leur ville et les affuble de lâĂ©tiquette de « fachos », il ferait mieux dâaller vĂ©rifier la dĂ©finition du mot « fascisme » dans le dictionnaire et ainsi se retourner le compliment, car comme disait Albert Camus dans Lâhomme rĂ©volté : « Toute forme de mĂ©pris, si elle intervient en politique, prĂ©pare ou instaure le fascisme. »
En attendant, continuons Ă nous mobiliser pour ce bien commun quâest le patrimoine, mais de grĂące, que ceux qui mĂ©prisent notre cause et la trouve poussiĂ©reuse arrĂȘtent de jeter des pierres Ă ceux qui la dĂ©fendent.
Nous ne sommes ni nazis ni fachos, nous sommes juste des citoyens libres qui respectons le passĂ© dans lâespoir de lui offrir un avenir.
« Lorsque le passĂ© nâĂ©claire plus lâavenir, lâesprit marche vers les tĂ©nĂšbres » â Alexis de Tocqueville
Alexandra Sobczak-Romanski



