Nous venons d’être alertés par l’Association Terre Dignoise, qui s’oppose à la destruction d’un patrimoine emblématique de la région de Digne-Les-Bains, et bien entendu, nous soutiendrons l’ensemble des démarches de l’association, car cet ouvrage d’art mérite un avenir autre que celui de tas de ferraille.
Le trafic routier est important à cet endroit. Il n’est donc pas question de s’opposer à la construction du nouveau pont. En revanche, le projet de sauvegarde du Pont des Arches doit être une priorité, ne serait-ce que pour l’attractivité du territoire.
Il nous semble tout à fait inopportun de détruire un édifice tel que celui-ci, en évoquant une quelconque dangerosité. S’il était dangereux, il serait fermé à la circulation. Or, ce n’est pas le cas. Pour le moment, les études de structures n’ont pas été communiquées par les services du Conseil Départemental en charge du dossier. Seul le projet du nouveau pont a été dévoilé. Le Pont des Arches appartient certes au Conseil Départemental des Alpes-de-Hautes-Provence, mais il appartient avant tout aux habitants du territoire et nombreux sont ceux qui y sont attachés. Tellement attachés, qu’un très joli faire-part de décès a été rédigé.
Ces lignes, écrites par Grégory Roose, résument tout.
Terre Dignoise, à travers une pétition que nous vous invitons à signer en fin d’article, ne désire pas créer la polémique mais souhaite simplement interpeller le Conseil Départemental sur la nécessaire préservation de leur patrimoine, chère au cœur de nombreux Dignois.
L’association a, par ailleurs, félicité les élus pour le projet du nouveau pont et pour leur investissement sur cette réalisation très importante pour le territoire. À l'occasion des vœux du Maire, les membres de Terre Dignoise ont expliqué à Madame Eliane Bareille que leur démarche visait simplement à préserver ce « Monument Historique » et à trouver une solution de conservation,
Ce pont été réalisé en 1894 par la « Société des Ponts et travaux en Fer », société qui a participé à L'Exposition universelle de 1900 et qui a comme autres réalisations les charpentes du Grand Palais des Beaux-arts ainsi que le pont de Suly à Paris.
Benoît De Souza, membre de l’Association Terre Dignoise, nous explique pourquoi conserver le Pont des Arches est une évidence :
Nous devons pouvoir trouver une solution d'ingénierie, économiquement satisfaisante pour conserver cette œuvre référencée. Dans la situation économique actuelle il est préférable de garder le patrimoine et d'économiser de l'argent. Mettons au moins en balance le coût de destruction et le coût de maintien pour une autre utilisation.
Nous espérons ainsi un dialogue plutôt qu'une fin de non-recevoir surtout à une époque où notre patrimoine est en danger.
Ce pont trouve sa place dans le paysage un secteur de ce territoire qui a toujours été défendu et soutenu par la DRAC PACA.
Nous pourrions tout à fait le conserver pour l’usage des piétons et pourquoi pas créer une piste cyclable ? Car il est important de préciser que ce pont conduit à l’entrée des musées promenade de la réserve géologique de Haute Provence, où se trouve le musée du CAIRN.
Le CAIRN est un centre d’art et un laboratoire de création et de recherche reliant l’art contemporain au territoire. Son objectif est d’encourager la production artistique en milieu rural. Depuis sa création en l’an 2000, le CAIRN est à l’origine d’une collection originale d’œuvres réparties sur tout le territoire de l’UNESCO Géoparc. Issue de résidences à Digne-les-Bains, cette collection est l’expression d’une recherche artistique unique en son genre à l’échelle internationale : une réelle spécificité de l’UNESCO Géoparc de Haute-Provence.
Depuis des décennies, des générations de géologues venues du monde entier passent sur ce pont et arpentent notre région. Au seuil des Alpes et de la Provence, cette fabuleuse terre révèle en une courte distance plus de 300 millions d’années.
Qui plus est, ce pont se situe sur un point névralgique de « la Route de la Mémoire et de la Terre. »
Au départ de cette route, commençons par scruter l'immense dalle de 320m2 recouverte de plus de 1500 ammonites et nautiles fossilisés. Cette dalle est un précieux témoin des fonds marins d’il y a 200 millions d’années. Pendant des millions d’années, la mer a recouvert la région. En se retirant sous l’effet de la surrection des Alpes, elle a fait émerger des trésors géologiques tels que le désert lunaire des Terres Noires, ou ces étranges monstres marins que sont les ichtyosaures.
Puis les rivières et les torrents creusèrent la roche jusqu’à sculpter de splendides clues dont les couleurs d'automne ravivent la puissance. On peut citer la clue de Sisteron, la clue de Péouré ou la clue de Barles.
Ce pont dessert donc plusieurs sites emblématiques du territoire.
L’histoire géologique tumultueuse de cette région est à l’origine de ses reliefs et de panoramas grandioses tel que celui du Vélodrome, où les couches successives évoquent un passé toujours difficile à mettre en perspective à l’échelle du temps de l’Homme. Depuis le Serre d’Esclangon (1152 mètres d’altitude), on découvre ce gigantesque pli au cœur duquel une lame de roche s’élance vers le ciel : la Lame de Facibelle.
Aussi monumentale puisse-t-elle être, la géologie se fait parfois discrète, comme les étonnantes empreintes de pattes d’oiseaux datées de 20 millions d’années. Il aura fallu certaines conditions météorologiques pour que ces empreintes puissent être un jour fossilisées et encore maintenant, bien conservées.
C’est indéniable, ce pont doit rester un témoin emblématique du Géoparc.
Si l’UNESCO a attribué un label à notre territoire c’est pour son patrimoine géologique, culturel, naturel et immatériel remarquable. Le Géoparc de Haute Provence fut le tout premier à être créé en 2000. Aujourd’hui, 177 géoparcs existent de par le monde.
De ce pont, nous pouvons contempler 300 millions d’années d’histoire de la Terre. Le détruire serait une monumentale erreur.