C’est l’aboutissement d’une longue bataille : aujourd’hui, plusieurs années après les premières démarches de prospection d’un discret promoteur dans votre secteur, après réunions d’information, constitution d’un collectif, distributions de tracts, réalisation de photomontages, apostrophe à politiques, mobilisation lors de l’enquête publique, nuits blanches et freins rongés, la décision de votre préfecture est tombée : le parc éolien que vous combattiez fait l’objet d’un refus.
Faut-il crier victoire ? Assurément ! Mais attention : le terme de « bataille » est ici bien choisi, car la guerre n’est peut-être pas terminée.
En effet, dans les deux mois qui suivent le refus, le promoteur éconduit a la possibilité de saisir le juge pour demander l’annulation de cette décision.
Or, si les refus préfectoraux tendent localement à voir leur nombre augmenter, leurs annulations aussi : ainsi, depuis mars 2021, sur 37 recours de promoteurs, 15 d'entre eux ont donné lieu à des annulations. Pire encore : dans plusieurs de ces cas, les autorisations environnementales ont été délivrées d’office par le juge lui-même.
Peut-on se prémunir d’une telle douche froide ?
OUI : tout comme il leur est possible de contester une autorisation de parc éolien, les associations, riverains et communes concernées ont la faculté de prendre part au procès lancé par le promoteur. Il s’agit du mécanisme de l’intervention volontaire.
Cette faculté, ouverte par l’article R. 632-1 du code de justice administrative, autorise en effet aux tiers à un procès ayant un intérêt à agir à déposer un mémoire et des conclusions dont l’objet est de soutenir la décision du préfet.
Cette intervention présente trois intérêts majeurs :
1. Elle permet aux intervenants de défendre le refus du préfet en faisant valoir leur propre dossier et compenser ainsi les éventuelles lacunes de l’arrêté préfectoral. C’est une occasion de mettre à profit les investigations qui ont pu être menées par les collectifs d’opposants et, ainsi, de suppléer les carences des arrêtés des préfectures (car malheureusement la motivation des arrêtés est souvent juridiquement critiquable) et de développer certains points que l’administration pourrait oublier d’aborder devant le juge.
2. Si le sort de l’intervenant suit celui du procès, il a cependant la possibilité de faire appel ou se pourvoir en cassation. Les préfectures n’actionnant pas toujours ces voies de recours lorsqu’elles sont déboutées, cette faculté peut s’avérer cruciale dans un procès.
3. Au-delà de leurs potentialités juridiques, les interventions volontaires accroissent la légitimité de la décision du préfet qui peut ainsi se trouver conforté dans son argumentaire par plusieurs acteurs, y compris publics si des communes y prennent part.
Je profite de cette occasion pour rappeler à tous les adhérents d’Urgences Patrimoine et ceux qui ne le sont pas (encore) de redoubler de vigilance en cette période estivale : l’attention locale étant moindre, c’est un moment idéal pour les délivrances d’autorisations et permis sur des projets polémiques. Prudence, donc !
Pour plus d'informations :
Maître Théodore Catry
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