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Les mesures les plus extravagantes fleurissent en ce moment portant indéniablement atteinte à l’ADN même de nos territoires et à leur intégrité — mesures prises généralement par des élus en mal de reconnaissance médiatique et qui cherchent tous les moyens pour se faire remarquer, au mépris des modestes citoyens que nous sommes. Dans un pays qui se veut démocratique, la dictature n’a pas sa place et priver les citoyens que nous sommes de leur culture et de leurs traditions (pour leur imposer des pratiques qui sont à des années lumières des leurs) est chose inacceptable.



Récapitulons :



8 septembre :



• Le Maire de Lyon a refusé de se rendre à la Basilique de Fourvière pour assister à la traditionnelle cérémonie du vœu des Échevins qui a lieu tous les 8 septembre depuis 1643 et il en rajoute une couche en fustigeant le Tour de France qui d’après lui est une manifestation machiste et polluante.



10 septembre :



• Le Maire de Rouen ne veut plus voir Napoléon sous ses fenêtres et souhaite le remplacer par une « figure féminine ».



11 septembre :



• Le Maire de Bordeaux ne souhaite plus voir de sapins de Noël dans la ville parce que ce sont des « arbres morts ».



13 septembre :



• Le Maire de Rennes autorise un défilé de cyclistes entièrement nus dans la ville au prétexte de dénoncer la fragilité des deux roues dans l’espace public.


Et demain ?



On ferme toutes les boutiques de fleuristes, car (si l’on se livre aux mêmes raccourcis de la pensée) elles vendent des « fleurs mortes » ?



On ne construit plus que des charpentes métalliques et on fabrique des meubles en plastique ?



On supprime toutes les traditions comme la Saint-Fiacre ou la Saint-Vincent ?



On enlève toutes les statues représentant des hommes et on les remplace par des « figures féminines » ?



On se ballade tous dans notre plus simple appareil tant que les vêtements ne seront pas en coton bio ?



Si l’on réfléchit bien, les polémiques ont commencé avec les crèches de Noël qu’il a fallu retirer de l’espace public il y a une bonne dizaine d’années. S’en sont suivies, à plusieurs reprises, des polémiques au sujet des villes commençant par « Saint-» qu’il faudrait « laïciser ». Je souhaite juste rappeler que les révolutionnaires de 1789 s’étaient déjà essayés à ce petit jeu : 1200 villes et villages furent ainsi (momentanément) débaptisés.



On vient de décider de changer le titre français d’un roman d’Agatha Christie.



La viande est interdite dans certaines cantines (vive le tofu).



On veut nous enlever nos jolies hôtesses du Tour de France et si l’on pouvait supprimer le Tour directement, ce serait mieux.



On interdit aux femmes la pratique du monokini.



Un musée vient même d’interdire son accès à une femme pour un décolleté jugé trop avantageux.



« La Libre Pensée » demande le retrait des calvaires et des statues religieuses (souvent centenaires) dans certaines communes.



Certaines écoles interdisent les Pères Noël au nom de la laïcité.

Enfin, inutile d’évoquer le sujet qui nous concerne en priorité, à savoir le nombre incalculable de démolitions d’édifices en tout genre, des églises aux châteaux en passant par les presbytères qui sont sacrifiés sur l’autel de la promotion immobilière.



Voilà donc une liste non exhaustive (et sans ordre précis), mais qui prouve bien les dérives auxquelles nous assistons.



Toute représentation de notre histoire, de notre culture, de nos traditions est devenue indésirable dans l’espace public.


À côté de ça, on « bétonise » à tout va, même dans les territoires dits « patrimoniaux ». On nous invite à manger mieux et bio des produits qui viennent de l’autre bout du monde. On nous assomme de programmes télévisés plus débiles les uns que les autres et on nous oblige même à payer une taxe pour ça. Fumer c’est mal, boire c’est mal, conduire une voiture c’est mal, avoir des seins c’est mal et voir des Saints c’est mal, penser c’est mal, et dire ce que l’on pense c’est encore plus mal… D’ailleurs on peut se demander si le port du masque obligatoire n’est pas pour nous habituer à porter une muselière plus tard.



Que l’on nous prive de liberté pour notre sécurité nous pouvons encore l’admettre, mais que l’on nous prive de tous les témoins de notre histoire collective, de notre culture et de nos traditions et même de nos habitudes cela commence à devenir insupportable. D’autant plus insupportable que les décisions de nos édiles sont souvent prises de façon unilatérale et sans aucune concertation. Or, le « peuple » ne peut pas être seulement considéré comme un contribuable. Payer c’est bien, mais payer pour voir son territoire perdre son identité et les français leur liberté est inacceptable.



Liberté, Égalité, Fraternité ? Si cela continu c’est cette devise qu’il faudra enlever de l’espace public, car elle ne correspondra plus à rien.



La France pays des lumières ? Hâtons-nous de les rallumer.


Alors qu’aux Invalides on s’apprête à restaurer le tombeau de Napoléon, à Rouen on l’envoie aux oubliettes.



Si Sainte-Hélène est bien connue pour être la terre d’exil de Napoléon Bonaparte, il se pourrait bien que Rouen se positionne sur ce « même créneau ».



Le Maire de Rouen souhaite remplacer la statue équestre de Napoléon sur la place de l’Hôtel de ville par une « figure féminine », mettant ainsi fin à 155 ans de règne de l’Empereur.



Certes, la statue retirée de son piédestal en juillet dernier est bien partie en convalescence pour soigner ses fragilités dues aux usures du temps, mais une fois restaurée, elle devait retrouver son emplacement d’origine. C’est ce qui avait été clamé haut et fort par le maire de Rouen.



Certaines « mauvaises langues » avaient vu dans ce retrait une volonté de faire disparaître définitivement Napoléon de cette place pour faire dans le « politiquement correct »mais, naïvement sans doute, nous n’y avons pas cru une seconde. Au contraire, nous avons même cru que suite aux événements qui conduisaient bon nombre de statues par terre dans le monde entier, cette mesure était une façon de mettre l’œuvre en sécurité.



Nous nous sommes trompés.



Alors cette restauration était-elle l’alibi d’une éviction préméditée ? C’est tout à fait possible.


Pour rappel, cette statue du sculpteur Vital-Dubray,avait été érigée en 1865 et inaugurée en grandes pompes. Le bronze utilisé provenait des canons de la guerre d’Austerliz : tout un symbole.



La question qui se pose aujourd’hui est : les élus ont-ils le droit de vie ou de mort sur le patrimoine de leur commune ? Certes, les Rouennais doivent être consultés, mais visiblement pas pour dire « stop ou encore » à Napoléon, mais pour choisir la « figure féminine » qui le remplacera.



Certes, il ne faut pas être contre la modernité et la mise en place d’œuvres contemporaines qui un jour seront-elles aussi considérées comme patrimoniales, mais mettre au rebut les statues emblématiques d’une ville pour les remplacer sur la seule volonté d’un élu nous semble totalement inopportun, voire provocant.



Le Président Macron dans une de ses allocutions avait bien affirmé qu’en France on ne déboulonnerait aucune statue. Alors à moins que l’information nous ait échappée, mais, jusqu’à preuve du contraire, Rouen est bien encore en France.




Certes, la volonté du maire fraîchement nommé est de faire de Rouen la capitale de la Culture, mais nous ne sommes pas certains que faire table rase du passé de la ville soit une bonne stratégie. D’autant que cette place de l’Hôtel de Ville est immense et que Napoléon pourrait parfaitement cohabiter avec des œuvres contemporaines. Patrimoine et modernité sont des mots qui peuvent aller très bien ensemble, à partir du moment où l’on respecte l’identité propre des œuvres.



Une ville ne doit pas rester figée, elle doit pouvoir s’enorgueillir de s’enrichir culturellement au fil des ans. Mais s’enrichir, c’est ajouter quelque chose et, en aucun cas, retirer l’existant. D’autant que sur l’ensemble du territoire, nous avons perdu de nombreuses statues en bronze pendant la guerre, fondues pour récupération sous le gouvernement de Vichy.



Alors cette décision unilatérale nous semble surréaliste de nos jours, même si le maire évoque la possibilité d’installer l’œuvre de Vital-Daubray dans un autre quartier de Rouen.



De plus, n’oublions pas que ce genre de « fantaisie » a un coût. L’extraction du piédestal toujours en place, son déplacement, et les fondations pour l’accueillir risque de se faire à grands frais. Alors même que la ville a du mal à entretenir son remarquable patrimoine, qu’elle a été contrainte de vendre plusieurs de ses églises, nous ne sommes pas certains que les contribuables Rouennais voient d’un bon œil ce tripatouillage.



Si Napoléon venait à disparaître de sa place, l’on pourra toujours se consoler en contemplant la médaille éditée pour l’inauguration de la statue le 14 août 1865.






Le 24 Juin 2020 est le jour où Napoléon, plus exactement sa statue équestre située place du Général de Gaulle à Rouen, a résisté à l’opération de démontage visant à protéger quiconque passerait à proximité. En effet, la statue de bronze représentait une menace du fait d’une dégradation se situant au niveau de la patte arrière droite du destrier. Une fissure de 20 centimètres de long sur 1 centimètre de large fragilisait dangereusement l’ensemble de l’édifice.



Dès 9 heures du matin, l’opération se déroulait à la perfection. Il est alors décidé de détacher la tête du buste de l’Empereur. Des sangles maintiennent la tête en place pendant que deux hommes s’activent autour du cou. Tout est fait pour protéger la statue de bronze, bronze qui serait issu d’une partie des canons des ennemis que Napoléon et son armée déjouèrent à Austerlitz. Mais Napoléon résiste à l’idée de “perdre la tête”. Au bout d’une heure et demi d’un travail acharné, la tête reste obstinément en place. Il est donc décidé d’opter pour une autre tactique : soulever la statue d’une seul et même bloc. Les sangles se multiplient sous un soleil de plomb jusqu’aux alentours de 10h30 où la première tentative de soulèvement a lieu. Les moteurs de la grue se mettent à ronronner, les journalistes présents préparent leurs appareils, … mais la statue ne bronche pas ! Au mieux, elle tangue légèrement de droite à gauche. Napoléon semble frissonner, ou rire ! Car il a décidé qu’il ne quitterait pas son socle.


La nouvelle tombe : l’horaire annoncé (9h-12h) ne sera pas tenu. Il faut à l’entreprise quelques heures supplémentaires pour qu’ils puissent desceller l’Empereur des Français. Rendez-vous est donné à 15 heures. Malheureusement, rien ne se passe comme prévu. Une nouvelle tentative a lieu et cette fois-ci, la statue de bronze ne bronche pas. Les journalistes s'interrogent et se regroupent pour savoir si Napoléon quittera Rouen aujourd’hui même.



Le verdict est là : Napoléon a déjoué les intentions des français qui souhaitaient le déplacer, quand bien même l’objectif était une restauration de cette œuvre du sculpteur Dubray et du fondeur Thiébaut. Une rumeur circule, et pas des moindres, puisqu’il semblerait que les difficultés rencontrées pour le désassemblage viendraient notamment du fait que les plans de la statue seraient manquants. Obstacle majeur qui force l’entreprise à abandonner.



Le bilan de cette journée est amer : il faudra revenir pour déloger la statue. Mais nul ne sait à quand cette opération pourra être reportée. Une semaine ? Un mois ? Plus ? Il s’agit d’une affaire à suivre, d’un duel que Napoléon a bel et bien remporté aujourd’hui. Napoléon, qui dans ce demi-sourire qu’offre la statue, semble vouloir dire “Battons-nous donc ! Mes amis, voilà le soleil d’Austerlitz !”Au moment où nous publions cet article, nous venons d’apprendre qu’une nouvelle tentative de dépose pourrait avoir lieu le jeudi 2 juillet, en attendant, une analyse approfondie du socle de plomb va être réalisée.


Mélaine LhommePour La Gazette du Patrimoine

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