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Le post que nous avons publié sur les réseaux hier ayant suscité hier de très nombreuses réactions, notamment la volonté d’en savoir plus sur cette démolition infondée. Nous avons trouver judicieux de refaire un point sur cette triste affaire.



Nous sommes donc en mai 2014 et nous sommes alertés par un jeune garçon, Thomas Nerrière, de la démolition prochaine du Château de Lagny-Le-Sec. Propriété de la mairie depuis une vingtaine d’année, ce dernier a été totalement laissé à l’abandon.


 


Immédiatement, nous lançons une pétition qui recueillera plus de 6500 signatures.



 Nous pensons alors avoir le temps, car aucun affichage règlementaire annonçant la démolition n’est visible sur les grilles du château.


 


Parallèlement à ça, nous demandons au Ministère de la Culture une mise en instance de classement d’urgence, afin de bloquer tout projet de démolition pendant un an. À l’époque, c’est Françoise Nyssen qui est Ministre de la Culture. Pour appuyer notre demande, l’ancien Ministre de la Culture, Jack Lang, va plaider la cause du château auprès de celle qui peut sauver l’édifice.




Voici la réponse de la Ministre à Jack Lang presque 3 mois plus tard. Sans commentaire…




Mais au fait, pourquoi la municipalité a décidé de démolir ?


 


Tout simplement pour construire en lieu et place de l’édifice un « ravissant » complexe multifonctions intergénérationnel. Bref, une salle des fêtes.  Nous ignorons quel cabinet d’architectes avait été retenu pour le projet, mais on est quand même loin de l’esthétique du château.



La question que nous posons c’est pourquoi ne pas avoir construit ce « complexe » dans le parc, tout en réhabilitant le château ? Car avec une surface de 8000 mètres carrés, il était aisé de faire cohabiter les deux.


 


Mais non, le maire estimait la restauration de l’édifice trop coûteuse, estimée d’après lui à 1 million d’euros — donc, la cohabitation ne sera pas l’option retenue.


 


Autre option qui aurait pu permettre de sauver le château : la vente à un opérateur privé. Le maire avait d’ailleurs reçu plusieurs offres en ce sens, mais là encore, ce fut un non catégorique et sans appel. Il voulait la peau de son château et il l’a eue.


 


Cependant, nous espérions tout de même un miracle, car nous n’avions aucune nouvelle du ministère et nous gardions l’espoir. Nous avions même prévu d’organiser le 18 juin, une manifestation devant le château.


 


Mais le 13 juin au soir, tous nos espoirs ont été anéantis par un appel téléphonique du jeune Thomas, qui était sur place. Il faisait nuit noire, mais une armée de pelleteuses se dirigeait tout droit vers le château. Nous savions alors que c’était terminé et que tous nos efforts et tout notre travail n’avaient servi à rien.




Bizarrement, au petit matin, comme par magie le panneau d’affichage annonçant la démolition était en place. Tout comme plusieurs arrêtés signés en hâte le 12 juin, interdisant l’accès au parc, au plus grand étonnement des habitants, car en théorie, la démolition devait avoir lieu beaucoup plus tard, en dehors de la période scolaire. Mais à cause de notre mobilisation et la demande de mise en instance de classement, le maire a précipité les choses de peur de voir son projet tomber à l’eau.





Voilà, fin de l’histoire. Le 14 juin, c’était clap de fin pour celui qui s’appelait jadis le château de Longperier.



Nous n’avons pu qu’assister impuissant à la démolition. Certains diront que nous n’avions qu’à nous enchaîner aux grilles du château pour empêcher les pelleteuses de faire leur sale boulot, mais ce ne sont pas nos méthodes. Non pas par lâcheté, mais uniquement parce que pour agir sur le long terme, il faut rester dans le fil du droit et qu’un « coup d’éclat » nous aurait conduit directement devant les tribunaux et que nous n’avons pas les moyens de payer de fortes amendes. Nous avons été condamnés pour avoir lutter contre la démolition de la chapelle Saint-Joseph à Lille, alors que nous avions « seulement » intenter des actions en justice, alors nous imaginons aisément ce qu’il nous serait arrivé pour Lagny-Le-Sec…


 


 Toujours est-il que, le château a été rayé de la carte, mais le complexe intergénérationnel n’a jamais été construit. Le projet a été abandonné par la municipalité, car jugé trop coûteux.


 


Enfin, réjouissons-nous, dans sa grande bonté, Grégory Doucet, le maire, a épargné la chapelle du château.


 


Il semblerait que les travaux de restauration soient imminents, car nous avons retrouvé un appel d’offres en 2022, pour la réhabilitation de ce « trophée ». Réhabilitation pour un montant d’un peu plus de 400.000 euros. À ce prix-là, on pourrait même en reconstruire deux, car c’est une toute petite chapelle, mais, soit, l’essentiel est qu’elle soit restaurée.



Cette triste affaire a fait à l’époque la une de tous les journaux. Elle fut même dans le top 50 des articles les plus lus de la presse nationale.


 


Depuis, on continue partout en France à raser de plus en plus de châteaux, petits ou grands, sans leur laisser la moindre chance de survie au prétexte que leur intérêt n’est pas suffisant.



À quand un jugement objectif de la valeur d’un édifice dans un contexte local et pas national ? Car si effectivement, comme beaucoup de témoins de l’architecture du XIXe, le Château de Lagny-Le-Sec n’avait pas un intérêt national, il était un marqueur fort de l’identité du territoire de la commune et ne méritait certainement pas de finir en tas de gravats.


Un peu d'Histoire


 


Voici un des illustres personnages de la famille de Longperier, propriétaire depuis des siecles de l'ancien château et peut être celui qui a fait construire le château menacé de démolition aujourd'hui !



Adrien de Longperier :



Il était le fils d'Henri Simon Prévost de Longpérier un commandant de la garde nationale qui fut par la suite maire de Meaux de 1840 à 1848. En 1836, il entra au cabinet des médailles de la Bibliothèque royale (future Bibliothèque nationale). Protégé par Raoul-Rochette, il obtient la place de premier employé en 18424. Il publia en 1840 une étude fondamentale sur la numismatique des souverains sassanides, et se consacra quelques années plus tard à la numismatique des Arsacides. Il fonde avec le baron Jean de Witte le Bulletin archéologique de l’Athenaeum français. En 1856, après le départ de Louis de la Saussaye, Adrien de Longpérier reprend avec Jean de Witte la direction de La Revue numismatique.


 


De 1847 à 1870 il fut conservateur des antiques au musée du Louvre. En 1848 il est le seul conservateur du Louvre à n’être pas renvoyé lors du changement de régime.



En tant que conservateur des antiques il était responsable de collections provenant d'aires culturelles et d'époques très variées. À ce titre, il accueillit au Louvre les premières sculptures assyriennes arrivées en France depuis Khorsabad, et s'intéressa de près au déchiffrement du cunéiforme. Il fut aussi chargé de recevoir la collection Campana.



Parmi des intérêts scientifiques nombreux on peut aussi citer les civilisations de l'Amérique et les antiquités nationales : Longpérier fut à l'origine d'un musée mexicain (1850) et l'un des membres de la commission de création du musée de Saint-Germain-en-Laye. À partir de 1854 il fut membre de l'Académie des inscriptions et belles lettres. Il fut directeur de la Revue numismatique de 1856 à 18726. À partir de 1858 il fut membre du Comité des travaux historiques et scientifiques.


 


Le pauvre a dû se retourner dans sa tombe le 14 juin 2017…



Et au cas où vous l’auriez ratée, voici notre publication Facebook d’hier sur le sujet  :


 


Le 14 juin 2017, les pelleteuses allaient avoir raison du Château de Lagny-Le-Sec. Nous avions été alertés le 24 mai 2017, hélas trop tard pour éviter ce bel exemple de patrimonicide. Nous avions pourtant tenté de demander une mise en instance de classement d'urgence, mais elle nous a été refusée...deux mois après la démolition (no comment).



C'était notre premier vrai combat et notre premier grand échec. Un échec qui nous a permis de comprendre que notre lutte contre les démolisseurs allait nous conduire à l'échec, bien plus souvent qu'à la victoire.



Peu importe. Comme l'a écrit Bertolt Brecht, "celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu." Alors plus que jamais, nous poursuivons ce combat contre les patrimonicides, qui sont hélas de plus en plus nombreux sur l'ensemble du territoire. N'oubliez pas que nous comptons sur vous tous pour nous soutenir, car pour combattre, il faut à la fois des soldats et des munitions. 


 "Le patrimoine ne peut pas lutter, ensemble, nous pouvons."




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Puisque la vidéo de la démolition du Château de Lagny-le-Sec tourne en boucle sur les réseaux sociaux depuis quelques jours, il me semblait judicieux de faire le point sur cette « triste affaire ». En effet, cet acte de « vandalisme patrimonial » remonte à trois ans, ce qui nous force à constater que les internautes ont parfois la mémoire qui flanche, car à l’époque cette démolition avait fait grand bruit, tellement de bruit que l’information se classait parmi les dix premières les plus consultées de la semaine.



Ce combat de l’impossible fut sans doute l’un des plus difficiles qu’Urgences Patrimoine a mené, pour un résultat qui était connu d’avance. Mais « à vaincre sans péril on triomphe sans gloire » et, même si point de triomphe à la fin, notre satisfaction était d’avoir fait le maximum.



Nous avions été prévenus seulement trois semaines avant la démolition par Thomas Nerrière, un jeune passionné de patrimoine qui aurait été capable de donner sa propre vie pour sauver ce château.


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Trois semaines, trois toutes petites semaines pour remuer ciel et terre et essayer de faire entendre raison à Didier Doucet, le maire « démolisseur ». Mais en vain. Il n’a d’ailleurs jamais souhaité communiquer avec nous.



Mais quel prétexte invoquait-il pour justifier cette scandaleuse démolition ?



Toujours le même : l’état calamiteux du château et les montants de restauration trop élevés par rapport à une démolition et la construction de la salle « multifonctions intergénérationnelle » qu’il souhaitait voir en lieu et place de l’édifice. Nous avons demandé à voir l’étude réalisée pour évaluer le montant desdits travaux, mais sans succès, et pour cause, il semblerait qu’elle n’ait jamais existé.


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Mais au fait, état calamiteux pourquoi ? Simplement, parce qu’après le rachat de l’édifice par la commune 25 ans plus tôt, jamais les moindres travaux d’entretien n’ont été réalisés.



On a délibérément laissé « mourir » le château, avec déjà la perspective, sans doute, de le démolir un jour et de posséder un joli terrain de plus de 8000 m2, sur lequel on pourrait faire pousser un joli petit immeuble ou, comme il en était question à l’époque, cette fameuse salle multifonctions, salle qui d’ailleurs n’a pas poussé pour le moment.



Donc, un fois « ciel et terre remués », jusqu’à Jack Lang qui avait écrit à Françoise Nyssen, alors Ministre de la culture, il a fallu se rendre à l’évidence, tout était fini pour le Château de Lagny. Et un soir de juin, tard, Thomas m’a appelé pour me dire qu’ils commençaient la démolition.

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Oui, car quand on est peu fier de ce que l’on fait, on se cache. Aussi quoi de mieux que de lancer un tel chantier en pleine nuit pour éviter d’être dérangé par les « détracteurs du projet » ? Le Château de Longperier (c’est son nom d’origine) est donc tombé une douce nuit de juin…



Les larmes des habitants, le lendemain, sont arrivées bien tard, car c’est à l’annonce de la démolition qu’il aurait fallu réagir. Hélas, à la moindre protestation de leur part, le maire leur disait que  « conserver le château et le restaurer fera considérablement augmenter les impôts locaux ». Toujours ce même prétexte, qui décourage le plus vaillant des habitants d’une commune.

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La solution état pourtant toute trouvée. Si le château était si « encombrant » financièrement, alors pourquoi ne pas l’avoir mis en vente ? Cela aurait permis à la commune de rentrer quelques deniers sonnants et trébuchants et ne pas avoir à faire payer les contribuables pour les frais de démolition. Mais non, malgré les différentes propositions de rachat, le maire s’est obstiné à vouloir démolir.



Fin de l’histoire. Enfin non, pas tout à fait, car il y a un avant et un après Lagny-le-Sec. Nombreux sont ceux qui ont été touchés par les image de cette démolition, et beaucoup ont pris conscience de l’intérêt de patrimoine pour un territoire. Hélas, bien souvent, par peur des représailles, les gens n’agissent pas localement, car ils ont peur, par la suite, de se voir refuser un permis de construire, une extension, ou un emploi au sein de la commune. Donc, on ne dit rien et on se lamente en silence.


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Alors pour une fois, je vais prêcher pour « notre paroisse », pour rappeler que tout le monde peut faire entendre sa voix de façon anonyme en adhérent à Urgences Patrimoine, car nous sommes les seuls à avoir le courage de nous opposer ouvertement aux démolitions sur l’ensemble du territoire. Alors, effectivement, personne ne donne à ceux qui luttent. On donne à ceux qui restaurent, mais il est bon de rappeler que, pour restaurer, encore faut-il qu’il reste des édifices, et au rythme où vont les démolitions je ne suis pas certaine qu’il reste grand-chose à restaurer s’agissant du patrimoine de nos belles communes de France.



Alors pour 5 euros, vous pouvez faire avec nous la « guerre aux démolisseurs » et vous engager en cliquant sur ce lien ICI.



« Le patrimoine ne peut pas lutter, ensemble nous pouvons »



Alexandra Sobczak-Romanski


Présidente d’Urgences Patrimoine


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