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Comme vous le remarquerez dans le titre de cet article, pour la première fois, nous n’avons pas écrit « pour sauver la chapelle » mais pour « sauver l’honneur de la chapelle ».



La cadence des travaux de démolition est telle que la semaine prochaine, alors même que les résultats des audiences ne seront pas connus, la chapelle Saint-Joseph ne sera plus qu’un triste souvenir pour ceux qui l’ont connue et pour tous ceux qui l’ont défendue.

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Aujourd’hui donc avaient lieu les ultimes audiences. L’une à 9h30 au Conseil d’État à Paris où Maitre Laurent Poulet-Odent représentait Urgences Patrimoine et l’ensemble des requérants. Cette audience avait pour but de faire casser la décision du Tribunal Administratif de Lille du 5 janvier 2020. Le juge nous avait alors débouté avec comme arguments principaux : l’avis favorable donné par l’Architecte des Bâtiments de France et le fait que Junia restaurait le Palais Rameau et que cela leur donnait toute latitude pour démolir « l’encombrante » chapelle Saint-Joseph.



Ces arguments, nous les avons entendus des centaines de fois, mais ce que nous contestions aujourd’hui en cassation, c’est le fait que le juge des référés n’ait à aucun moment tenu compte de toutes nos pièces contradictoires qui mettaient en avant la valeur historique, patrimoniale et architecturale dans un contexte local.



Son verdict confirmait donc le refus de mise en instance de classement que le Ministère de la Culture avait prononcé le 14 novembre 2020 par le biais d’un communiqué officiel.



Ce matin, le rapporteur du Conseil d’État a hélas prononcé le rejet de notre requête pour les mêmes motifs. Maître Poulet-Odent va donc rédiger une note en délibéré pour plaider une ultime fois la cause de la chapelle et la décision finale du Conseil d’État devrait être connue d’ici une quinzaine de jours.



C’est à 10 heures que se tenait notre seconde audience au Tribunal Administratif de Lille où notre avocat, Maître Théodore Catry allait, lui aussi, devoir défendre l’honneur de l’édifice déjà bien défiguré. Lors de cette audience, la juge des référés s‘est montrée attentive et a souhaité que Maître Catry lui expose les raisons pour lesquelles la chapelle présente un véritable intérêt architectural (enfin, « présentait »). Il a donc fait part de l’ensemble des documents attestant de l’intérêt majeur de l’édifice : tribune des 106 Universitaires, études techniques réalisées par le bureau d’étude Anthémion, lettres de soutiens de nombreux professionnels du patrimoine, etc…



Enfin, il a pu faire valoir aujourd’hui toutes ces précieuses notes contradictoires.



Cette audience en référé pour illégalité, avait pour but de démontrer l’erreur d’appréciation du Ministère de la Culture qui dans son refus de mise en instance de classement, affirmait que le permis de démolir et le permis de construire étaient déjà accordés, alors que si le permis de démolir a bien été accordé en mai 2019, le permis de construire, déposé par Junia en décembre 2020 n’est pas encore signé.



Une erreur qui pourra sembler anecdotique, mais qui est notable dans le cadre du « dossier » Saint-Joseph.

Attendons maintenant la décision finale du juge des référés qui mettra un terme à cet épuisant feuilleton juridique… En attendant bien entendu notre recours au fond, mais pas avant au moins 6 à 8 mois. D’ici là, la chapelle ne sera plus que poussière, mais nous mettrons tout en œuvre pour, à défaut de l’avoir sauvé, la venger et faire enfin reconnaître ses qualités architecturales notables, hélas « post mortem ».



Mais, comme vous pouvez le constater, elle a toujours fière allure. Quelle tristesse …

Souvenons-nous de la grande opération du Ministère de la culture visant à sensibiliser les jeunes au patrimoine et à sa sauvegarde. On peut dire qu’au Ministère de la Culture on a beaucoup d’humour.


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Voici la présentation officielle de cette opération sur le site du Ministère :



L’accès de tous à la culture et au patrimoine



En s’adressant à des jeunes issus des territoires prioritaires, urbains mais aussi ruraux, C’est mon patrimoine ! a pour ambition de les sensibiliser aux patrimoines et à l’histoire à travers une offre culturelle de qualité.



Ce sont ainsi chaque année plusieurs centaines de sites (monuments, musées, archives, villes et pays d’art et d’histoire, patrimoine industriel, sites archéologiques ou patrimoines immatériels) qui leur sont ouverts pour une découverte privilégiée et une pratique artistique et culturelle de qualité.



C’est mon patrimoine ! permet aux enfants et adolescents de développer leur goût du patrimoine et des arts, d’enrichir leurs connaissances et les aide à mieux comprendre l’intégration d’un lieu patrimonial dans son environnement géographique et culturel.



Si l’idée première est tout à fait louable, il serait peut-être bon de réfléchir comment ne pas déstabiliser les jeunes en leur présentant quasi quotidiennement des démolitions.



Ces jeunes qui sont censés être les gardiens du patrimoine de demain doivent se poser bien des questions quant à la valeur de « leur patrimoine », lorsque celui-ci finit sans remords sous les crocs des pelleteuses.



Imaginez donc ce que doivent penser les 600 collégiens du collège Saint-Paul qui assistent depuis mercredi, alors qu’ils sont en cours, à la démolition de l’édifice.



Longtemps Junia (l’école d’ingénieur à l’origine de la démolition) avait indiqué que, pour des raisons de sécurité, les opérations de démolition ne seraient pas réalisées en présence des élèves mais, sans doute par peur du résultat de notre ultime référé dont la date avait été fixée au 18 février, la sécurité n’est apparemment plus de mise et les travaux ont été avancés.



Si cette démolition va, nul doute, entraîner de vives réactions de la part de tous ceux pour qui le patrimoine et sa sauvegarde ont du sens, qu’en est-il de ces jeunes adolescents à qui l’on offre un tel spectacle ?



Est-ce là une façon de faire d’eux des adultes engagés pour la mémoire collective ? Est-ce là la façon de les sensibiliser à la cause du patrimoine ?



En tout cas, c’est la façon que l’Université Catholique de Lille pense être la meilleure pour leur apprendre le respect du passé, avec la bénédiction du Ministère de la Culture qui s’illustre ici de façon magistrale dans le rôle du donneur de (mauvaises) leçons, en criant haut et fort que seul le patrimoine dit « remarquable » doit être conservé et que le patrimoine des territoires, même s’il s’inscrit dans un contexte architectural cohérent, peut être mis par terre.



Nous ignorons quelle est l’opinion de ces collégiens qui assistent à ce spectacle affligeant depuis les fenêtres de leurs classes, mais ce que nous savons, c’est qu’ils respirent la poussière dégagée par ces travaux de démolition.

Nous pensons qu’il est grand temps que Madame Bachelot débaptise cette opération du Ministère de la Culture et que désormais on la nomme « C’était Mon Patrimoine ».

Alors que la majorité des chantiers sont à l’arrêt dans les Hauts-de-France à cause de la neige, à Lille, sans doute le seul chantier en action, aujourd’hui est celui de la démolition de la chapelle Saint-Joseph.


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La « toute puissance publique » a sans doute décidé qu’il ne fallait pas attendre le verdict des différents recours en justice d’Urgences Patrimoine et des riverains pour commettre l’irréparable et mettre ainsi un terme à la présence de l’édifice en ce lieu depuis près de 135 ans.



Notons que les travaux devaient commencer pendant les vacances scolaires pour des raisons de sécurité, mais visiblement la sécurité n’est pas la préoccupation première des démolisseurs.



Ce combat fut le pire et le plus difficile que nous avons mené et notre première conclusion sera de dire que face à un ministre sourd et à une justice aveugle le patrimoine n’a aucune chance.



Enfin, mention spéciale à l’Université Catholique qui est la principale responsable de ce patrimonicide — et nous n’avons qu’un mot à dire à cet instant : « Dieu reconnaîtra les siens ».



Nous reviendrons plus en détails sur ces tristes événements ultérieurement, le temps de nous remettre de cette terrible nouvelle.

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