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Lors d’une de nos visites à Saint-Léger-de-Montbrun, au chevet de la chapelle de Vrères, monsieur le Maire nous a fièrement montré le « cadeau » d’une habitante de la commune, stocké dans le local à corbillard de la chapelle. Il nous a fait part de son projet de restaurer ce tombereau* et de lui offrir une seconde vie, au sein même du village.


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Caparol étant une de nos entreprises mécènes, c’est tout naturellement que nous avons proposé au premier édile de lui faire offrir la peinture nécessaire à cette restauration. C’est donc dans le cadre de l’opération « 125 ans, 125 projets » que l’entreprise s’est empressée d’accéder à notre demande.


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Pour certains, 20 litres de peinture peuvent sembler anecdotiques, mais pour une commune rurale d’à peine mille deux cents âmes, il n’y a pas de petites économies, surtout lorsqu’il s’agit d’un projet d’embellissement.



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Les services techniques de la commune ont donc pu se mettre à l’œuvre et ainsi redonner vie à ce petit témoin de la mémoire collective.


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Nous remercions une fois encore l’entreprise Caparol d’avoir répondu à notre appel, même si nous savons que nous pouvons compter sur son engagement au service du patrimoine des territoires. Toutes les entreprises peuvent apporter une petite pierre à nos édifices, mais toutes ne le font pas — c’est la raison pour laquelle nous apprécions ce geste.



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*Tombereau désigne des engins de transport et manutention et dont l'utilisation est ancienne. Il peut concerner : des véhicules, généralement agricoles ou de chantier, destinés à transporter des matériaux. Il est plus spécialement adapté au transport et déchargement rapide du vrac. Sa particularité est que la caisse peut basculer pour vider le chargement. De là vient le nom, du verbe tomber, au sens ancien de basculer. Les tombereaux pouvaient être, suivant leur taille, tirés à bras ou par des animaux de trait ou un tracteur. (Sources Wikipédia)

Comme nous vous l’avions annoncé en fin de semaine dernière, la justice a entendu la voix du patrimoine et ce petit édifice sera épargné par les pelleteuses.


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Nous remercions le propriétaire pour sa confiance, Monsieur Yann Loreau pour sa précieuse expertise et bien évidemment, notre avocat, Maître Théodore Catry qui a réussi à convaincre le juge de l’arrêté de péril abusif dont été victime ce patrimoine.



Voici les conclusions de Maître Catry :



Cette maison représente un bien architectural remarquable. Datée pour ses parties les plus anciennes du XIVe Siècle, elle présente notamment des éléments d’ornementation de l’époque de la Renaissance, tels qu’un linteau en accolade, ainsi que des jambages et encadrements dits en « double-baguette ».


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Elle est en outre percée par des baies principales à linteaux en arcs surbaissés, à dater du XVIIe Siècle.



La richesse ornementale de cette propriété, inhabituelle pour une maison de bourg de ce style et de cette partie du Nivernais, témoigne d’une recherche savante dans la composition de la façade qui laisse discerner une certaine aisance de ses commanditaires.



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Il s’agissait aussi du projet d’une vie. Les travaux, commencés au début des années 2000, allaient connaître une phase décisive avec la réfection de la toiture et de la charpente. Les travaux étaient autorisés sur le plan administratif.



C’est à ce moment-là que la commune a frappé l’édifice d’un arrêté de péril et a prescrit comme seule mesure propre à y mettre fin la démolition pure et simple.


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Cette pratique était totalement illégale : un arrêté de péril ne peut légalement édicter une mesure de démolition tant qu’il n’existe pas de solution alternative moins radicale. Or, dans le cas de la maison de Saint-Saulge, l’état du bâti était très loin de justifier sa destruction et impliquait uniquement des mesures de protection et de confortement.



Sur la base de cet argument décisif, le tribunal administratif de Dijon a jugé l’arrêté de péril illégal et l’a annulé.



Une histoire qui se termine bien — ce qui n’est hélas pas toujours le cas. Nous espérons que la commune ne fera pas appel de cette décision, ce qui viendrait à gaspiller l’argent du contribuable de façon injustifiée.




Encore un patrimoine qui va être rayé de la carte à grands coups de pelleteuses, dans quelques jours. Alors qu’on labellise à tout va des édifices de cette époque, à Angoulême, on a fait le choix de la démolition. Démolition d’un style, démolition d’une époque, démolition d’un marqueur fort de l’identité du territoire. Rassurez-vous braves gens, il va pousser ici un établissement flambant neuf sans âme, un de ces gros cubes de béton que nous voyons pousser un peu partout, rendant lisses et sans intérêt nos belles villes de province.



Cet œuvre de l’architecte Roger Baleix aurait pu faire l’objet d’une réhabilitation intelligente, offrant ainsi un avenir à ce grand et beau patrimoine. Mais à Angoulême, comme un peu partout hélas, on préfère investir 1,5 millions d’euros pour démolir, plutôt que de réhabiliter.



Un collectif d’architectes vient d’être créé pour tenter l’impossible et essayer de sauver ce qui pourrait encore l’être. Bien évidemment, Urgences Patrimoine a répondu présent, même si nous savons qu’il est bien tard. À moins d’un miracle émanant du Ministère de la Culture, comme un cadeau d’adieu avant les élections, les pelleteuses devraient entrer en scène dans les prochaines semaines.



Voici en tout cas le très beau plaidoyer du collectif :


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Le Vieux Girac ou la fin de l'histoire ?



Serions-nous donc arrivés à la fin de l'histoire ? La disparition du "Vieux Girac, première maison de retraite d'Angoulême hors les murs, semble actée et avec elle, la mémoire d'une époque qui peut paraître bien lointaine : les années 1930, celles des premiers programmes d'habitat social, celle des premières attentions aux faibles et aux anciens.



Cette destruction annoncée est une véritable blessure qui témoigne de la rudesse de notre monde contemporain.



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Roger Baleix, l'architecture généreuse



Ce bâtiment remarquable signé de l'architecte Roger Baleix (1885-1958) témoigne de cette époque "Art Déco" où se conjuguaient des compositions simples et fortes avec une très grande attention aux détails, jamais égalée par la suite dans un domaine hospitalier devenu hyper fonctionnaliste.



Roger Baleix, architecte urbaniste du département de la Charente dans les années 1930, a marqué le début du XXème siècle angoumoisin par des œuvres exemplaires contribuant à enrichir le vocabulaire architectural indispensable à la mémoire collective parvenant jusqu'à nous. Son œuvre a fait l'objet d'une exposition à l'Alpha en 2015 et d'un fascicule édité par "Pays d'Art et d'Histoire". Tout angoumoisin connaît les surprenants immeubles de logements des rues Rousselot et Chabasse dans le quartier Victor Hugo avec leurs façades dentelées de bow-windows, les superbes écoles de Saint-Cybard et La Couronne avec leurs généreuses arcades, l'ancienne caserne des pompiers Resnier avec ses enduits si particuliers et, bien sûr, l'ancienne bibliothèque municipale sobre et majestueuse face à l'espace Franquin. Autant de bâtiments conçus avec soin et témoignant d'un profond humanisme.



L'école Mario Roustan à Angoulême et l'école Marie Curie à La Couronne ont reçu en 2015 le label "Architecture Contemporaine Remarquable", démontrant l'intérêt de ces constructions par leur singularité, leur caractère innovant, leur exemplarité dans la participation à une certaine politique publique. Les élus de l'époque, en manifestant leur enthousiasme pour l'architecture comme expression de la culture, n'ont pas hésité à confier à cet architecte hors du commun le soin de répondre à des commandes publiques, ne trouvant pas meilleur successeur à Paul Abadie.



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Un site fortement dégradé



L'architecture du "Vieux Girac" porte en elle une véritable profondeur humaine exprimant de façon unique sa fonction d'accueil des plus faibles. Dans les décennies passées, ce bâtiment a malheureusement beaucoup souffert d'interventions très douteuses l'ayant rendu illisible dans le magma qu'est devenu au fil du temps le centre hospitalier d'Angoulême.



Un fast food s’est imposé en premier plan de sa façade perceptible depuis le rond-point de Girac, et une aile a même été construite en plein milieu du jardin à la française qui accompagnait la composition en papillon de sa façade sud, ouverte sur la campagne.



Aussi, l'image que peuvent en avoir aujourd'hui beaucoup d'angoumoisins non avertis est-elle sans doute celle d'un bâtiment vieilli et sans attrait, d'autant plus que les façades vues depuis le rond-point de Girac sont des façades "arrières" orientées Nord, perturbées par des extensions disgracieuses, à l'opposé de l'esprit des ailes ouvertes en papillon sur le jardin Sud.


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Effacer, c'est oublier



Notre époque nous submerge d’images furtives, qu'un clic de souris peut remplacer par d'autres. On croit qu'il en est de même avec l'espace urbain réel, où tout serait aussi facile et immédiat. Or, nous aimons tous la ville quand elle se reconstruit sur elle-même en gardant les traces de son histoire. La construction de l'espace urbain prend toute sa valeur et toute sa saveur dans le temps long, quand elle ne gomme pas mais peaufine, ajoute des touches, épaissit.



Cette facilité à détruire le Vieux Girac jusqu'à faire table rase témoigne d'une société où le présent oublie la mémoire et, à travers elle, ignore le respect de ceux qui ont mis tout leur engagement pour construire des rêves de sociétés meilleures.



Or, ce n'est pas parce qu'un bâtiment n'est pas classé ou labellisé qu'il faut le négliger. Certains bâtiments, plus que d'autres, auront joué un rôle dans la vie de gens, soit qu'ils y auront vécu, soit qu'ils s'y seront rendus, soit tout simplement qu'ils seront passé devant. Le Vieux Girac, c'est tout cela à la fois, mais avec une âme en plus.


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La démolition, naufrage d'une politique à courte vue



La "déconstruction" de ce bâtiment nous est aujourd'hui présentée de façon cynique comme une mine de matériaux à valoriser : on saura trier l'amiante, le bois et la brique, mais qu'en sera-t-il des éléments remarquables de l’architecture : verrières-vitraux, lampadaires, sols, corniches, tous spécialement dessinés pour ce bâtiment... ? Nous ferons tout pour sauver ce qui peut encore l'être, mais le mal est beaucoup plus profond que la perte de beaux éléments d'architecture ouvragés. En détruisant un tel bâtiment, c'est une vision politique précise de l'avenir que l'on choisit, où se conjuguent tragiquement la perte de mémoire et la surconsommation des ressources de la planète. C'est le choix du tout jetable.



Alors qu'il n’y a pas le moindre projet pour le site, nous nous devons de nous étonner du cycle administratico-juridico-technico-politique qui a conduit à cette situation déplorable, que l'on aurait voulu croire d'un temps révolu.



C'est le fonctionnement de cette technocratie qui est en cause : la machine à casser, mises-en route il y a 25 ans face à des désarrois techniques avérés, n'a jamais su se remettre en question jusqu'à changer de paradigme, ne tenant aucunement compte des approches nouvelles, respectueuses à la fois de l'histoire et de l'économie des ressources. Si la bêtise technocratique l'emporte au bout du compte, il faut en tirer les leçons : plus jamais ça !


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Voir loin, voir haut : conjuguer sobriété et mémoire



Dans d'autres lieux, avec des décideurs mieux éclairés, on aurait déjà trouvé à valoriser ce patrimoine puissant, à curer les extensions qui n'auraient jamais dû exister, à chercher les moyens techniques d'une reconversion ambitieuse. On avance des faiblesses structurelles qui auraient empêché toute conservation, mais on se cache souvent derrière des normes ou des règles pour justifier l'injustifiable. Nous avons tous reconverti des bâtiments complexes pour connaître quel est le champ des possibles, et nous savons que le chemin qu'il faut alors emprunter n'est pas le plus simple car il demande une vision affirmée, et surtout une posture assumée.



Tous les angles d'approche de ce site n'ont été que technicistes, c'est-à-dire restreints. Il n'y a jamais eu une approche globale, c'est-à-dire architecturale, urbaine et paysagère, qui ne néglige pas mais englobe les aspects techniques.



Comment ne pas s'interroger sur le sort funeste de cet édifice stratégiquement positionné en entrée de ville sans répondre au préalable à sa capacité de transformation ? Hôtel, logements pour infirmières ou apprentis, pépinière d'entreprises, ... les programmes possibles ne manquaient pas en cet endroit stratégique. Rappelons qu'une pépinière d'entreprises a été construite à deux pas, que des logements pour infirmières et apprentis sont en chantier à La Couronne, et que des locaux sont recherchés pour les entreprises de l'image ...



Autant de projets qui auraient manifestement trouvé leur place en ces lieux. Pour ce faire, aurait pu être lancé un processus d'information pédagogique à tous les niveaux de décision, collectif, participatif auprès des habitants du bassin de vie, par le biais d'ateliers, d'expositions, de découvertes d'itinéraire architectural ou paysager.


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Des paroles aux actes



Au lieu de cela, les décideurs n'ont su que recourir à la facilité de la tabula rasa, préférant un appauvrissement du langage culturel réduit à de la pure gestion foncière.



Car c'est avec toujours le même fil conducteur, celui d'un raisonnement de type industriel où on construit, démolit, reconstruit sans cesse sans aucune envie d'Histoire, surtout pour ne pas avoir d'histoires ... Les hôpitaux sont devenus d'énormes machines sans âme, des rouleaux compresseurs ne sachant pas s'arrêter face à des brins d'âme. Broyer l'hôpital, encore. Quelle énergie, pour transformer des matériaux de qualité en granulats qui demanderont à nouveau une énergie folle pour être réemployés ! Démolir pour démolir, sans projet, pire pour du stationnement : qui peut encore penser de la sorte en 2022 ?



Pourtant, les temps ont changé, du moins le croyions nous. Nous savons maintenant que l'avenir ne pourra qu’être sobriété, qu'il faudra éviter de tels gâchis monstrueux. Le discours de nos élus est « vert », la parole se montre engagée vers le respect de l'environnement.



On se pince même quand on apprend par le journal que l'agglomération d'Angoulême serait « pionnière » en France comme territoire pilote de sobriété foncière. Un élu local important affirme même que « les villes doivent aujourd'hui se développer sur elles-mêmes ; les friches sont un levier de réinvestissement ». Angoulême ville de la culture, ville Unesco : est-ce donc une fable, tout comme les discours de respect de l'environnement, d'économie circulaire, de « ça y est, on a ouvert les yeux » ! ? Quand les actes sont autant en contradiction avec les discours, comment encore croire en la parole politique ?


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Revenir à l'humain



Dans ce monde si dur, la machine hôpital doit plus que jamais revenir à l'humain. En s'en éloignant, l'hôpital en souffre et nous fait souffrir car il continue à participer à la cité moche et sans âme qui l'entoure.



Loin de l'art déco voué à de belles constructions isolées, le Vieux Girac, par son ampleur, témoigne d'une époque heureuse et optimiste portée avec une sincérité généreuse au niveau le plus précieux pour une ville, celui de l'hospice accueillant ses aînés.



C'était hier, c'était il y a presque un siècle, c'était il y a une éternité.



Devons-nous baisser les bras ? Ce texte est le début d'un sursaut. Que nous soyons acteurs de l'acte de construire ou tout simplement citoyens, il est du devoir de tous d'agir sur la chose publique en réagissant face à tous les coups portés contre le patrimoine, quand il recèle en lui d'aussi forts symboles du progrès humain.



Nous appelons ici à ce simple devoir de mémoire qui est celui du respect d'une Histoire d'autant plus grande quand elle rejoint l'histoire de tous. L'architecture nous parle peut-être plus que jamais de nous-mêmes quand on la détruit.




Association 1901


Pour la promotion de


La création architecturale


et de l’aménagement


du cadre de vie

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